DE GAULLE
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Thème
Mai 1940. La guerre s’intensifie. L’armée française s’effondre, les Allemands sont aux portes de Paris. Gagné par la panique, le gouvernement de Paul Reynaud (Olivier Gourmet) se replie à Bordeaux, puis, complètement dépassé, abandonne le pouvoir au Maréchal Pétain… qui décide d’accepter la défaite et de signer un armistice. A Colombey-les-Deux-Eglises, un homme de cinquante ans, tout juste nommé général, marié, et père de trois enfants -dont une petite fille trisomique- ne va pas l’entendre de cette oreille. Sous-secrétaire d’Etat à la guerre, il veut infléchir le cours de l’Histoire et continuer le combat en s’appuyant sur les ressources de l’immense empire colonial que possède alors encore la France. Cet homme-là s’appelle Charles de Gaulle. Pendant qu’à cause de la débâcle, sa femme Yvonne (Isabelle Carré) et leurs enfants prennent la route de l’exode, le futur chef de la France libre, lui, rallie Londres et entre dans la clandestinité, cela, pour faire entendre une voix française encore minoritaire: celle de la Résistance. Quand il lancera depuis la B.B.C. son appel du 18 juin, Yvonne le rejoindra après un long périple, la mettant ainsi hors de portée des représailles des autorités françaises qui auraient paralysé l’action de son mari.
Points forts
– Le culot du projet. Jusqu’à présent, aucun cinéaste n’avait osé faire de Charles de Gaulle le héros d’un film de fiction.Trop héroïque ? Trop intimidant ? Trop iconique ? Trop clivant, le « Général » ? En tous cas, mises à part quelques apparitions ici et là (dans l’Armée des ombres, par exemple, ou Paris brûle-t-il, ou encore Martin Soldat ), l’homme d’Etat français n’avait jamais eu les honneurs du grand écran. Si Gabriel Le Bomin s’est lancé, c’est parce qu’il avait trouvé un angle original : faire le portrait du de Gaulle que le grand public ne connaît pas ou presque, celui d’avant sa « statufication », juste à ce moment charnière de sa vie où il va s’insurger contre la soumission des autorités françaises à l’Allemagne et choisir la clandestinité en espérant, depuis Londres, rallier tous les Français qui, comme lui, veulent continuer la lutte contre l’envahisseur.
Au cours de ses recherches historiques, le réalisateur tombe sur des lettres échangées entre Charles et Yvonne. La richesse de cette correspondance va le décider à donner à son film historique un souffle romanesque en nous montrant un de Gaulle intime.
– Le casting. Et d’abord, qui, pour jouer De Gaulle? Gabriel Le Bomin n’a pas hésité longtemps. Il s’est vite tourné vers Lambert Wilson, qui non seulement a l’habitude de jouer des personnages historiques, mais a la même prestance et (presque) la même taille que le Général. Ce choix s’avère excellent. Aidé par des prothèses faciales et une vraie moustache, Lambert Wilson est saisissant, qui restitue à la perfection la posture un peu grandiloquente de son personnage dans ses fonctions d’homme public, mais qui l’abandonne pour une bouleversante humanité dans ses scènes d’intimité. Isabelle Carré incarne avec sa justesse et son engagement habituels l’épouse bien aimée du Général. Toute la distribution est formidable, de Catherine Mouchet, magnifique de compassion dans son rôle de gouvernante, à Olivier Gourmet, parfait dans son incarnation de Paul Reynaud.
Quelques réserves
Même si, dans toutes ses interviews Lambert Wilson dit ne pas avoir voulu « endosser » vocalement son personnage pour ne pas tomber dans une posture caricaturale (« Ma mission était de donner la sensation d’un homme, pas de le singer » explique-t-il), d’aucuns, sans doute, lui reprocheront cette liberté, criant au crime de lèse-majesté.
Encore un mot...
Aucun film de cinéma n’avait encore jamais été consacré à celui qui est la personnalité politique française la plus célèbre du XXème siècle. C’est dire si ce De Gaulle, qui sort cinquante ans après sa mort, était attendu. Le concentrer sur les trois mois cruciaux pendant lesquels celui qui n’est alors qu’un militaire (presque) anonyme acquiert à la fois un statut (celui de chef de la résistance) et une stature (celle d’un homme d’Etat), se révèle être une formidable idée. Elle laisse le loisir au réalisateur Guillaume Le Bomin, en même temps qu’il dresse le portrait d’un politique appelé à un grand destin, de lever le voile sur son intimité.
On découvre alors à quel point l’homme de Colombey-les-deux-Eglises, si froid et si rigide en public, si inflexible aussi sur les valeurs morales et la grandeur de la République, fut, dans le civil, un chef de famille bienveillant et un mari attentionné pour son épouse, Yvonne (qui apparaît ici bien loin des clichés de « potiche » dont on l’a souvent affublée ). De Gaulle, époux et père aimant ? C’est la grande révélation de ce film ambitieux, à la fois historique et romantique.
Une phrase
« Quand on commence à réfléchir aux acteurs qui peuvent incarner le De Gaulle de cette époque là, un homme de 50 ans, grand, avec de l’allure, de l’autorité et de la présence, les choses vont assez vite ! Ajoutez-y la notoriété du comédien qui doit rassurer les investisseurs… et la liste se raccourcit encore… Lambert Wilson a fait la différence d’autant qu’il a le goût des personnages romanesques et des figures de l’Histoire… C’est un acteur qui ne recherche pas forcément le naturalisme. Il aime construire un rôle » ( Gabriel Le Bomin, réalisateur).
L'auteur
Après avoir commencé sa formation dans une école italienne de cinéma dirigée par Ermanno Olmi, Gabriel Le Bomin l’a achevée au Service cinématographique des armées. En réalisant de nombreux documentaires et en accédant à de nombreux documents d’archives de guerres, c’est dans ce service que le jeune cinéaste (né en 1968 à Bastia) va se forger une sensibilité dans ce domaine. Cette thématique jalonnera ensuite toute sa filmographie.
Après quelques courts-métrages, en 2006, il se lance dans le long. Les Fragments d’Antonin, qui traite des blessés psychiques après la première guerre mondiale, lui vaut, en 2007, une nomination au César du meilleur premier film. En 2009, pour son second film, il aborde le thriller psychologique contemporain. C’est Insoupçonnable, adapté du roman de Tanguy Viel. En 201, il revient au film d’Histoire avec Nos patriotes, inspiré de l’histoire réelle d’Addi Bâ, un tirailleur sénégalais engagé dans la résistance dès 1940.
Ensuite, pendant plusieurs années, le cinéaste va essentiellement travailler pour la télévision, en réalisant plusieurs documentaires à caractère historique sur de grands conflits. De Gaulle, qu’il a co-écrit avec l’historienne d’art Valérie Ranson- Enguiale marque son retour au grand écran. Gabriel Le Bomin est le premier réalisateur à porter sur grand écran l’auteur de l’Appel du 18 juin.
Et aussi
– « PAPI SITTER » DE PHILIPPE GUILLARD – AVEC GÉRARD LANVIN, OLIVIER MARCHAL, CAMILLE AGUILLAR…
Appelés par un travail qu’ils ne peuvent refuser, Franck et Karine sont contraints de confier leur fille Camille – censée réviser son bac – à son grand-père André, un gendarme retraité, gentil, mais complètement psycho-rigide. La situation va se corser quand va débouler à l’improviste l’autre grand-père de la bachelière, Teddy, un type au coeur d’or, mais aussi fantaisiste et noceur qu’André est coincé et maniaque. Chamailleries, engueulades, claquements de porte, mensonges éhontés, mauvaise foi… Entre ces deux « sexas » que tout oppose, ça va commencer par barder, laissant à Camille tout le loisir de leur glisser entre les doigts. Adieu le bac… bonjour le flirt, le surf, la belle vie !
Après Le Fils à Jo et On voulait tout casser, Philippe Guillard continue de célébrer, avec humour et épicurisme, la famille et l’amitié. Tourné dans ce Sud-Ouest si sensuel, si beau, et que le réalisateur connaît comme sa poche pour y avoir été champion de rugby, Pappi Sitter respire la joie de vivre, la générosité, la convivialité et la tendresse. Chacun dans leur rôle de papi, Olivier Marchal et Gérard Lanvin, laissent éclater leur connivence et forment un duo du tonnerre. Leur plaisir à s’engueuler et jouer ensemble est palpable et contagieux. Chic ! voilà une comédie rocambolesque mais sans chichi ni artifice, où on célèbre les bonnes choses de la vie, où on respire à plein poumons et où on rit sans mauvaises arrière-pensées. Ce « buddymovie » chaleureux, divertissant, potache et tous publics mériterait de cartonner.
Recommandation : excellent.
– « LA COMMUNION » DE JAN KOMASA – AVEC BARTOSZ BIELENA, ELIZA RYCEMBEL…
Dans un centre de détention de mineurs polonais, Daniel, 20 ans, se découvre une vocation spirituelle. Mais le crime qu’il a commis l’empêche d’accéder aux études de séminariste. Qu’à cela ne tienne ! Alors qu’il est envoyé dans une petite ville pour travailler dans une menuiserie, le jeune homme parvient à se faire passer pour prêtre et à prendre la tête de la paroisse. L’arrivée de ce jeune prélat aux idées progressistes va bousculer beaucoup de choses dans cette communauté conservatrice…
Inspiré d’une histoire vraie, à la fois émotionnel, sensuel et spirituel, le film La Communion parle des pouvoirs de la foi, du pardon et de la rédemption. Formellement très beau, tendu d’un bout à l’autre, porté par un jeune acteur au charisme magnétique (Bartosz Bielena), ce film – qui est le troisième d’un réalisateur sorti de la très fameuse école de cinéma de Lódz – avait été nommé aux derniers Oscars dans la catégorie : Meilleur film international. Il arrive en France auréolé du succès qu’il reçu en Pologne.
Recommandation : excellent.
– « OSKAR & LILY » DE ARASH T. RIAHI – AVEC LEOPOLD PALLUA, ROSA ZANT, CHRISTINE OSTERMAYER…
Oskar et Lily, deux enfants tchétchènes, sont sur le point d’être expulsés alors qu’ils résident en Autriche depuis six ans, parlent un autrichien impeccable et sont très bien intégrés. Pour les protéger et tenter de repousser leur départ, leur mère fait une tentative de suicide. L’expulsion est momentanément suspendue, mais les deux enfants sont séparés et placés chacun dans une famille d’accueil. Ils vont tout faire pour se revoir et surtout pour retrouver leur mère.
Pour son deuxième film, le réalisateur iranien Arash T. Riahi s’inspire à la fois du roman éponyme de Monika Helfer et de sa propre expérience d’enfant iranien exilé en Autriche à l’âge de dix ans. Cela donne ce film qui traite des ravages psychologiques chez les enfants quand ils sont brutalement arrachés à leur mère et aussi de l’inhumanité de certaines expulsions d’immigrés. Formellement très réussi, à la fois politique et psychologique, réaliste et poétique, par moments, même, onirique, Oskar et Lilly est un film fort, puissant, d’autant plus bouleversant que les deux jeunes comédiens qui jouent les deux rôles titres sont formidables de justesse.
Recommandation : excellent.
– « LA DANSE DU SERPENT » DE SOFIA QUIRÒS UBEDA – SCMACHLEEN GUTIÉRREZ, HUMBERTO SAMUELS…
Selva (13 ans) vit dans une petite ville côtière des Caraïbes. Après la disparition de son unique figure maternelle, elle est la seule qui reste pour prendre soin de son grand-père qui ne veut plus vivre. A force d’observer le monde, elle va découvrir qu’en mourant, on ne fait que changer de peau et qu’on peut se transformer en tout ce que l’imagination permet: en loup, en chèvre, et même en ombre. La pré-adolescente qu’elle était va ainsi faire doucement son entrée dans le monde des adultes…
La magie, la fin de l’enfance, les relations entre une petite fille et son grand-père, la façon d’accompagner quelqu’un jusqu’à sa mort et de finir par en accepter le deuil… Pour son premier film, la jeune réalisatrice Sofía Quirós Ubeda aborde beaucoup de thèmes. Elle aurait pu s’y perdre et nous y perdre… Elle signe au contraire une oeuvre limpide, d’une grande poésie, d’une douceur bienfaisante et d’une naïveté touchante. On est d’autant plus charmé par ce récit d’initiation que ses images sont splendides, son rythme nonchalant et qu’il est porté par une jeune comédienne hypnotique, d’une grâce peu commune, Smachleen Gutiérrez. Il n’est pas étonnant qu’au dernier festival de Cannes ce beau film ait fait sensation à la Semaine de la Critique.
Recommandation : excellent
– « MONOS » D’ALEJANDRO LANDES – AVEC JUILANNE NICHOLSON, MOISÉS ARIAS…
Dans ce qui ressemble à un camp de vacances isolé au sommet des montagnes colombiennes, des ados aux drôles de surnoms ( Rambo, Lady, Bigfoot…) semblent jouer à la guerre. Sauf qu’on va vite s’apercevoir que leurs armes ne sont pas factices et qu’en réalité, ce sont de jeunes rebelles engagés par un groupe para-militaire pour surveiller une otage américaine, et aussi une vache, qui leur fournit leur lait. Quand la vache meurt accidentellement, les choses se gâtent, d’autant que l’armée régulière se rapproche. Contraints à la fuite, les jeunes guérilleros n’ont qu’une solution : aller se réfugier dans la jungle. L’hostilité de la nature va changer la donne du groupe. Fini le « un pour tous, tous pour un ». C’est désormais chacun pour soi…
Dans sa brutalité, sa sauvagerie, sa célébration de la nature aussi – splendide jusque dans son hostilité – Monos évoque Sa Majesté les Mouches de Peter Brook, ou Aguirre, la Colère de Dieu de Werner Herzog. C’est surtout un drame qui nous plonge dans une expérience sensorielle d’une captivante intensité. Deuxième film du réalisateur colombien Alejandro Landes, Monos avait remporté l’an dernier au Festival de Sundance, le Prix spécial du Jury. On en sort secoué.
Recommandation : bon.
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