ALINE
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Thème
Québec, fin des années 60. Sylvette Dieu (Danielle Fichaud) et son mari Anglomard (Roc Lafortune) accueillent Aline, leur 14ème enfant. Dans cette famille simple et généreuse, on aime la musique et on en écoute beaucoup. La petite Aline, elle (Valérie Lemercier) va plus loin : elle chantonne toute la journée. Un jour, sa mère comprend que sa fille a une voix d’or. Lorsqu’elle la fait écouter à Guy-Claude, un producteur de musique, ce dernier (Sylvain Marcel) n’a plus qu’une idée en tête : faire d’Aline la plus grande chanteuse du monde. Épaulée à la fois par sa famille et par Guy-Claude, dont elle va finir par tomber tomber éperdument amoureuse malgré leur différence d’âge, Aline va commencer à écrire les pages d’un destin hors du commun.
Points forts
Depuis qu’elle a découvert Céline Dion en 1995 à la sortie de son album Deux, Valérie Lemercier n’a plus jamais cessé d’adorer la chanteuse. Sa voix, ses chansons, sa gentillesse, son franc-parler, la fulgurance de son incroyable carrière, et aussi son histoire personnelle de petite fille de famille nombreuse, à la fois timide, naïve et culottée, tout, chez elle subjugue Valérie. Alors un jour de 2016, à la mort de René ( le mari de Céline), elle se jure, croix de bois, croix de fer, qu’elle va rendre un hommage à son idole à travers un film, qui tiendrait à la fois du biopic et du conte de fée. Du biopic pour que tout le monde comprenne sans hésitation que derrière son Aline se cache la vraie Céline. Et du conte de fée, pour qu’elle, Valérie Lemercier, puisse quand même romancer son histoire comme elle l’entend.
Après avoir lu et regardé tout ce qui était disponible sur Céline et ses proches pendant plus d’un an, Valérie appelle son amie Brigitte Buc (avec qui elle avait déjà écrit Palais Royal) pour « tricoter» un scénario. Parallèlement, elle mincit, intensifie ses cours de danse, travaille sa gestuelle, apprend à parler avec l’accent québécois et… prend des cours de chant. S’il n’est pas question d’imiter Céline, il s’agit quand même de l’évoquer sans la trahir. Valérie recompose le réel avec un maximum de précision et l’enjolive ensuite avec des petites anecdotes de son invention.
Et puis, surtout, au fil du travail d’écriture, elle décide que son film, qu’elle intitule Aline, sera axé sur l’histoire d’amour de Céline et de son mentor, René, qui devient, sous sa plume, Guy-Claude.
Ce travail préparatoire terminé, elle se penche sur la distribution. Crédibilité du film oblige : celle-ci sera à 90% québécoise. « Ce n’est pas une question d’accent, explique la cinéaste, mais plutôt d’état d’esprit ». Un comique, Sylvain Marcel, décroche le rôle si primordial de Guy-Claude, et il y est bouleversant de sensibilité. Une formidable actrice de théâtre, Danielle Fichaud est pour sa part choisie pour être la mère de l’héroïne. Et elle aussi émeut par sa faconde, son naturel et sa justesse.
La réalisation est à la hauteur de l’ambition du projet. Elle est riche, rythmée, ample, spectaculaire, et elle est portée par la voix de Victoria Sio qui interprète tous les « tubes » du film censés être chantés par Aline.
Quelques réserves
Aucune. Peut-être les fans de Céline Dion regretteront-ils que le film soit plus axé sur la vie familiale et amoureuse de la chanteuse que sur ses concerts et ses « tubes ».
Encore un mot...
Après plus d’une année d’attente, voici enfin sur les écrans, Aline. Vrai grand film mais faux biopic de Céline Dion, il raconte le parcours de la chanteuse de ses 7 à ses 50 ans. Par un extraordinaire jeu d’effets spéciaux, c’est Valérie Lemercier qui interprète elle-même la star planétaire à tous les âges de sa vie. Aussi bluffant qu’émouvant, et aussi drôle que dramatique, Aline avait mis la salle debout lors de sa projection au dernier festival de Cannes. Sauf imprévu, cette superproduction (23 millions d’euros de budget) devrait être l’un des plus gros succès français de l’année. Elle le mériterait tant elle est réussie à tous les points de vue : scénario, dialogues, réalisation et interprétation. Du travail d’orfèvre, enthousiasmant.
Une phrase
« Sans la connaître, j’étais fan de sa voix, de ses chansons et de sa personnalité. Elle est très inspirante, très amusante, jamais ennuyeuse. Elle transforme tout en show… elle a beaucoup d’intensité, elle ne triche pas, elle est à fond dans ses chansons… Pour l’interpréter, il fallait que je sois elle à 2000%. Evidemment, ce n’est pas moi qui chante, c’est Victoria Sio, qui est remarquable » (Valérie Lemercier, actrice réalisatrice).
L'auteur
Est-il encore nécessaire de présenter Valérie Lemercier, l’une des actrices-réalisatrices les plus populaires de France ? Juste donc rappeler qu’elle est née à Dieppe le 9 mars 1964 ( elle est l’une des rares comédiennes à ne pas faire de mystère sur son âge ! ), qu'elle a grandi à Gonzeville en Seine-Maritime dans une famille de propriétaires exploitants agricoles, a appris son métier de comédienne au Conservatoire de Rouen, a débuté en 1988 à la fois à la télé dans la série humoristique culte Palace et au cinéma dans Milou en mai de Louis Malle.
Des débuts fracassants qui feront qu’elle n’arrêtera plus, enchaînant les rôles, aussi bien sur scène (souvent, pour des one-woman shows désopilants écrits par elle) qu’à la télé et sur le grand écran. D’un tempérament hyperactif, elle réalise aussi ponctuellement des films : Quadrille, en 1996; Le Derrière, en 1999; Palais Royal en 2005; 100% Cachemire en 2013, et en 2017, Marie- Francine, qu’elle co-écrit avec Sabine Haudepin et pour lequel elle renoue avec ses rôles de bourgeoise. Aline est le sixième film de cette artiste complète qui est la seule humoriste à avoir raflé trois « Molière » pour ses one-woman-shows.
Parmi les autres distinctions tombées dans son escarcelle, elle a été sacrée « humoriste de l’année » aux Victoires de la musique 1997 et a remporté par deux fois le César de la meilleure actrice dans un second rôle au cinéma : en 1994 pour Les Visiteurs de Jean-Marie Poiré, et en 2007 pour Fauteuils d’orchestre de Danièle Thompson.
Et aussi
— UNE VIE DÉMENTE d’Ann SIROT et Raphaël BALBONI — Avec Jo DESEURE, Jean LE PELTIER, Lucie DEBAY…
Ça commence par une scène désopilante, celle d’un couple de trentenaires, Alex et Noémie, qui rend visite à un sexologue pour qu’il lui fournisse le mode d’emploi précis pour mettre en route un enfant. On pense tomber dans une comédie déjantée dont les cinéastes belges ont le secret. Mais voilà qu’Alex apprend que le comportement de plus en plus fantasque de sa mère, Suzanne, galeriste de son métier, traduit en fait, chez elle le début d’une démence sémantique. On devrait basculer vers le drame et pourtant, le film va garder, jusqu’au bout, son ton fantasque et loufoque. Pour leur premier long métrage, Ann Sirot et de Raphaël Balboni ont réussi un pari très difficile : faire rire avec une tragédie — une maladie dégénérative —, et cela, sans que jamais ce rire ait quelque chose de malsain et qu’il naisse, au contraire, du burlesque parfois engendré par les situations les plus désespérées. Inspiré du drame personnel que vivait Raphaël Balboni avec sa propre mère, Une vie démente est un bijou de film dont on sort heureux et joyeux malgré son sujet. La faute, à un scénario malin qui a choisi d’appuyer là où ça fait du bien, et à une distribution impeccable, en tête de laquelle Jo Deseure, une actrice de théâtre complètement désinhibée, absolument époustouflante. Sans doute la plus belle tragi-comédie qu’on ait vue depuis longtemps sur le grand écran, Une Vie démente avait raflé au dernier Festival de Saint-Jean-de-Luz le Prix du public, celui de la Mise en scène, celui du Jury jeunes et celui de l’interprétation féminine. Une telle moisson de prix pour un même film dans un même festival, cela se rencontre très très rarement.
Recommandation : 4 coeurs
— OLGA d’Elie GRAPPE — Avec Théa BROGLI, Anastasia BUDIASHKINA, Sabrina RUBTSOVA…
Kiev, 2013. A quinze ans, Olga ( Anastasia Budiashkina, comédienne amateur, magistrale, et aussi vraie jeune athlète d’élite) est parmi l’une des meilleures gymnastes ukrainiennes. Elle vise sa sélection aux prochains championnats d’Europe qui sont l'antichambre des Jeux Olympiques à venir. Mais les enquêtes que mène sa mère, journaliste, sur la corruption régnant au plus haut sommet de l’État font craindre des risques pour la vie d’Olga. Pour la mettre à l’abri, cette dernière l’envoie en Suisse, le pays de son père décédé. Alors que Kiev s’embrase, Olga se retrouve exilée. Comment supporter le poids d’une telle situation, comment, aussi, rester concentrée sur son sport lorsqu'on sent qu’on n’est pas réellement cooptée sa nouvelle équipe et qu’on apprend, en plus, qu’on va devoir abandonner sa nationalité si on veut concourir sous la bannière du pays qui vous accueille?
Pour son premier long métrage, le jeune suisse d’origine française Elie Grappe nous propose un beau film d’apprentissage qui pose la question de l’engagement des sportifs de haut niveau et des sacrifices qu’ils doivent consentir pour grimper au sommet ou y rester. Cette première oeuvre est passionnante, d’abord parce qu’en nous faisant pénétrer dans des lieux d'entraînement d’habitude fermés au grand public, on comprend l’engagement, les sacrifices et le courage physique qu’impose la discipline de la gymnastique, ensuite parce que, contrairement aux idées reçues, elle montre que la pratique du sport de haut niveau n’empêche pas qu’on puisse rester un citoyen du monde. Très bien filmé, tendu, très documenté, Olga avait été sélectionné en compétition à la 60ème Semaine de la Critique. Il en était ressorti avec le Prix SACD. Il représentera la Suisse aux Oscars 2022.
Recommandation : 4 coeurs
— MARCHER SUR L’EAU de AÏSSA MAÏGA — DOCUMENTAIRE.
Au Nord du Niger, le village de Tatiste, victime du réchauffement climatique, se bat pour avoir accès à l’eau. Chaque jour, des enfants marchent des kilomètres pour aller en puiser dans des puits très éloignés, ce qui les empêche d’être assidus à l’école. Parfois même, la pénurie du précieux liquide oblige les adultes à quitter leur famille pour aller chercher au-delà des frontières les ressources nécessaires à leur survie. Or il suffirait d’un forage pour apporter l’eau au centre du village et offrir à tous ses habitants une vie meilleure…
Les problèmes écologiques font de plus en plus l’objet de documentaires. Témoin celui-ci, signé Aïssa Maïga. Militante active des droits de la femme et des combats antiracistes, la comédienne française est passée derrière la caméra pour évoquer les effets du réchauffements climatiques sur les terres de ses grands-parents sénégalais et maliens. Son film, qu’elle a tourné sur plus de deux ans, est d’autant plus formidable qu’il n’est à aucun moment plombé par un ton didactique et moralisateur ? Conçu comme un documentaire, Marcher sur l’eau se regarde comme un reportage. Passionnant, beau, édifiant, touchant.
Recommandation : 4 coeurs
- HAUTE COUTURE de Sylvie OHAYON — Avec Nathalie BAYE, Lina KHOUDRI, Pascale ARBILLOT…
Première d’atelier au sein de la Maison Dior, Esther (Nathalie Baye) prépare sa dernière collection Haute Couture avant de prendre sa retraite. Un jour, elle se fait voler son sac par Jade, une gamine de 20 ans qui vit d’expédients (Lyna Khoudri). Mais cette dernière, prise de remords, vient lui restituer son bien. Séduite par le culot de la jeune chapardeuse, Esther décide de lui donner sa chance. Elle lui propose un poste d’apprentie au sein de son illustre Maison…
Deuxième film de Sylvie Ohayon, Haute Couture visite un thème cent fois exploré au cinéma : celui de la chance qu’on offre à une jeune déclassée des banlieues. La nouveauté est qu’il se déroule dans un milieu rarement montré sur le grand écran (sauf à l’occasion de biopics de grands couturiers), celui de la Haute Couture, avec tout ce qu’il exige de passion, d’abnégation, de travail et de savoir-faire. Dommage que ce nouveau film sur la transmission et l’intégration ne soit pas cousu aux petits points et qu’il soit plombé par un manichéisme lourdingue (la séquence de fin frise le ridicule) car la photo est belle, l’intention généreuse et la distribution épatante. Lyna Khoudri, notamment, fait une fois encore des étincelles.
Recommandation : 3 coeurs
— A GOOD MAN de Marie-Castille MENTION-SCHAAR — Avec Noémie MERLANT, SOKO, Vincent DEDIENNE…
Transsexuel en phase de transition, Benjamin, infirmier de son métier, décide de porter l’enfant qu’il aura avec Aude, la femme infertile et cisgenre qu’il aime et dont il partage la vie sur l’Ile de Groix en Bretagne, depuis 6 ans…
Décidément Marie-Castille Mention-Schaar aime les sujets de société qui font débat. Après Les Héritiers (2014), inspiré d’une histoire vraie qui avait pour thème le devoir de mémoire quant à la Déportation et la Shoah dans les lycées, et Le Ciel attendra (2016), un drame sur la radicalisation islamiste de jeunes filles françaises, la voici qui s’attaque au délicat problème de la maternité des personnes transgenre, une première dans le cinéma français de fiction. Face au risque que la cinéaste prend à être « incendiée » par les opposants de cette pratique et aussi par ceux qui vont lui reprocher de ne pas avoir fait appel à un vrai trans pour jouer Benjamin, il est difficile de ne pas saluer le cran de la réalisatrice. On pardonnera d’autant plus les maladresses narratives de son film — par moments trop lourdement pédagogique — qu’elle a confié le rôle de Benjamin à Noémie Merlant, sa comédienne fétiche. Présente sur presque tous les plans, l’actrice est absolument bluffante en homme. Une petite question, en passant, à la réalisatrice : « why » ce titre en anglais ?
Recommandation : 3 coeurs
— CRY MACHO de Clint EASTWOOD — Avec Clint EASTWOOD, Eduardo MINETT, Natalia TRAVEN…
Fin des années 70 au Texas. Mike Milo, une ancienne star du rodéo (Clint, « himself ») accepte une ultime mission, presque impossible : ramener du Mexique où il vit avec sa mère alcoolique, Raphaël, dit Rafo, le fils adolescent d’un de ses ex-patrons et, accessoirement, lui apprendre à monter à cheval. Stetson vissé sur la tête, le vieux cow-boy s’embarque sur des routes poussiéreuses. Usé, mais encore séduisant (cf : la fascination qu’il va exercer sur une restauratrice mexicaine). Évidemment sa mission va l’amener à des découvertes imprévues…
A 91 ans, Clint Eastwood n’a toujours pas décidé de prendre sa retraite. Le revoici devant et derrière la caméra pour ce film - le 39ème qu’il réalise - qui débute comme un road movie et se termine comme un film crépusculaire et élégiaque. Même si Cry Macho, d’une mise en scène très épurée, se traîne un peu, on le regarde avec tendresse et nostalgie, ne serait-ce que pour l’élégance nonchalante de son acteur principal, celui qu’on a tant admiré dans moults de ses films précédents.
Recommandation : 3 coeurs
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