Alice et le maire
Infos & réservation
Thème
Après trente années de mandats politiques, Paul Théraneau, le maire socialiste de Lyon (Fabrice Luchini) va mal. Complètement usé, il n’a plus d’idée. Pour lui redonner le goût de penser, on décide de faire appel à une jeune et brillante philosophe qui vient d’intégrer l’équipe municipale. La nouvelle recrue, Alice Heimann (Anaïs Demoustier) n’avait pas de fonction vraiment définie, la voilà chargée de réveiller les neurones du maire. Vaste programme ! Le détachement affiché d’Alice pour le monde politique, ses idées progressistes, sa fraîcheur, sa loyauté et son bon sens… Tout, en elle, devrait hérisser le vieux politicien… Elle va le séduire. Leur confrontation va se révéler enrichissante pour eux, passionnante pour le spectateur.
Points forts
- D’abord un grand coup de chapeau à Nicolas Pariser qui non seulement a osé s’aventurer dans les arcanes du monde politique, mais qui, surtout, a réussi à en tirer un film clair, passionnant, édifiant. Les réalisateurs qui parviennent à décrypter avec malice, sagacité, réalisme et finesse, les jeux et enjeux de la vie politique ne sont pas légion. En 2011, il y avait eu Pierre Schaeller avec son puissant Exercice de l’Etat. Il va désormais falloir compter avec Nicolas Pariser, déjà auteur d’un premier long métrage très intéressant, Le Grand jeu.
- Ce cinéaste dit que, dans un premier temps, il avait conçu son film comme une succession de discussions entre Alice et le maire, puis qu’ayant senti que cette suite de « dialogues philosophiques » serait sans doute trop rébarbative pour le spectateur, il avait fini par échafauder un récit autour de ces dialogues. Il avait vu juste. Ce stratagème lui a permis de nous offrir un film, à la fois spectaculaire, riche en images et en situations, mais sans rien lui enlever de son authenticité. Evidemment, on pense à la structure des films d’Eric Rohmer, ce qui n’est pas un hasard puisque Pariser dit avoir beaucoup emprunté à celui qu’il revendique comme étant son maître.
- Pour porter un film qui donne la part du lion aux dialogues, il fallait des comédiens capables de les restituer, dans toute leur vérité et dans toutes leurs nuances. En maire de Lyon blessé mais prêt à rebondir, Fabrice Luchini est magistral. Depuis l’Hermine, on n’avait pas vu le comédien aussi sobre et aussi inspiré. A la fois lumineuse et pudique, simple et intello, Anaïs Demoustier impressionne. Quelle actrice ! Elle confirme qu’à trente-deux ans, elle est l’une des valeurs les plus certaines du cinéma français.
Quelques réserves
- Le scénario patine un peu en son milieu. Mais on s’en aperçoit peu, tant les dialogues étincellent.
Encore un mot...
Au moment de son tournage à Lyon, Alice et le maire, qui met en scène un maire socialiste au bout du rouleau, avait déclenché une polémique. D’aucuns y voyaient déjà un portrait au vitriol de Gérard Collomb. La fièvre est retombée. Fabrice Luchini ne fait pas penser un seul instant à l’actuel locataire de la mairie lyonnaise et même s’il est réaliste, le film est bel et bien une fiction. Une fiction brillante, enlevée et brillamment interprétée. Une fiction, qui, fait aussi appel, pour une fois, à l’intelligence des spectateurs.
Une phrase
« Dans mon film, les personnages ne parlent que de politique. C’était un défi de départ que je crois avoir tenu. En revanche, ce que raconte le film ne se résume pas au contenu de ces conversations. A travers elles, les âmes des personnages se révèlent- Enfin, c’est ce que j’espère ». (Nicolas Pariser, réalisateur).
L'auteur
Après des études de droit, de philosophie, d’histoire de l’art et de cinéma, Nicolas Pariser, né le 29 septembre 1974, est, au début des années 2000, critique de cinéma pour le magazine Sofa. Après avoir travaillé pendant quatre années auprès du réalisateur et scénariste Pierre Rissient, il se lance dans la réalisation, d’abord de courts métrages, dont en 2013, Agit Pop (sélectionné à la Semaine de la critique au Festival de Cannes), puis de longs en 2015, avec Le Grand jeu, qui recevra le Prix Louis-Delluc du meilleur premier film.
Alice et le Maire est le deuxième film de ce cinéaste quadragénaire qui avoue, entre autres, un grand intérêt pour la chose politique et une admiration passionnée pour Eric Rohmer.
Et aussi
« J’irai où tu iras » de Géraldine Nakache - Avec Géraldine Nakache, Leïla Bekhti, Patrick Timsit…
Mina et Vali sont deux sœurs que tout oppose. La première, thérapeute, est distante, rationnelle et autoritaire. La seconde, chanteuse, est rêveuse, émotive et immature. Rien ne relie ces deux sœurs là, sauf l’amour fou qu’elles portent à leur père. Cloué par la maladie, ce dernier se voit dans l’obligation de demander à Mina d’accompagner Vali à Paris à une audition qui pourrait lui permettre de devenir choriste de Céline Dion. Ce voyage qui s’annonce apocalyptique pour les deux sœurs va se révéler être celui de leur réconciliation…
Après deux co-réalisations avec Hervé Mimran ( Tout ce qui brille et Nous York), Géraldine Nakache se lance en solo dans la réalisation. En solo, mais pour un genre de film qu’elle connaît bien, et qui fait le grand huit entre rire et larmes, celui de la comédie dramatique ; mais aussi avec, comme complice devant la caméra, son amie de toujours, celle qu’elle considère être la sœur qu’elle n’a pas eue, Leïla Bekhti. Et bingo, cela fonctionne formidablement. Parce que ces deux là, mises face à face devant une même caméra y vont à fond la caisse dans le talent, la sincérité et la facétie. Il faut dire qu’elles ont pu s’appuyer ici sur un scénario aussi sensible que drôle. Patrick Timsit qui joue leur papa est formidable d’émotion. Il trouve là une belle occasion de nous rappeler qu’il est, aussi, un grand acteur dramatique.
Recommandation : excellent.
« Le regard de Charles » de Charles Aznavour et Marc Domenico_ Documentaire - Avec la voix de Romain Duris.
En 1948, Edith Piaf offre sa première caméra à Charles Aznavour, une Paillard qui ne le quittera plus. Jusqu’en 1982, le chanteur va filmer sa vie, ses bonheurs, ses malheurs, « ses amours, ses amis, ses emmerdes ». En tout, des heures et des heures de pellicule. Cette manne va rester dans les armoires du chanteur, jusqu’à ce que, quelques mois avant sa mort, il ne se décide à la confier à son ami, le documentariste Marc di Domenico, pour qu’il en reconstitue une sorte « d’autoportrait ». Car c’est bien de cela qu’il s’agit. A partir de ces milliers de bouts de pellicule, comme des fragments d’un miroir brisé, Di Doménico est parvenu à recomposer le portrait en creux d’un artiste dont on croyait tout connaître. Le résultat est ce film, touchant, où on découvre que Charles Aznavour, en plus d’être le poète et le chanteur que l’on sait, fut un homme secret, romantique, ultra sensible, crucifié aussi, à tout jamais par la mort, par overdose, de l’un de ses fils.
Recommandation : excellent.
« Chambord, le cycle éternel » de Laurent Charbonnier. Documentaire. Avec la voix de Cécile de France.
Imaginé et voulu par François 1er, conçu et dessiné par Léonard de Vinci, Le château de Chambord, qui est l’un des plus beaux joyaux de la Renaissance, fête cette année son 500° anniversaire. Pour célébrer cet événement, le plus grand spécialiste français des images animalières, Laurent Charbonnier, a décidé de lui consacrer un documentaire. C’est comme si le cinéaste nous offrait une magnifique leçon d’Histoire. Il nous raconte la genèse de ce monument si pharamineux que sa construction s’étala sur plus de deux siècles ; les bouleversements politiques et artistiques auxquels cet édifice sans équivalent architectural aura assisté du haut de ses multiples tourelles ; les élans d’amour qu’il aura suscités, etc..
En amoureux du monde animal, Laurent Charbonnier nous entraîne aussi dans le parc du château, l’un des plus vastes de France, qui abrite un écosystème unique. Les images, sont, bien sûr, somptueuses, le commentaire, dit par Cécile de France passionnant pour qui aime l’Histoire, (la grande et la petite), l’architecture et la vie animale. Avec un peu plus de poésie et d’originalité dans la narration, ce documentaire aurait mérité la palme de l’excellence.
Recommandation : bon.
« Vous êtes jeunes, vous êtes beaux » de Franchin Don - Avec Josiane Balasko, Gérard Darmon, Patrick Bouchitey, Denis Lavant…
A 73 ans, vivant modestement d’une maigre retraite, Lucius ( Gérard Darmon) partage ses jours entre des balades solitaires, des pots entre copains et des visites à son éternelle fiancée (Josiane Balasko). Un jour, pour améliorer son ordinaire et aussi mettre un peu de piment dans sa vie dont il sait qu’elle va le quitter plus vite que prévu, il accepte de participer à des combats de boxe clandestins entre septuagénaires, devant des publics jeunes et cyniques… Sa vie, et aussi sa vision du monde vont s’en trouver bouleversées…
Pour son premier film, Franchin Don a choisi de traiter d’un sujet souvent délaissé par le cinéma : la solitude et la déshérence des retraités de milieux modestes. C’est d’autant plus courageux qu’il aborde ce sujet sous un angle choc, celui de l’exploitation de la fragilité physique et psychologique des personnes âgées. Josiane Balasko et Gérard Darmon habitent superbement son film. Touchant, poignant, édifiant.
Recommandation : bon.
Ajouter un commentaire