Love & Friendship
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Thème
Jeune veuve dont la beauté et le pouvoir de séduction font frémir la haute société britannique de cette fin du XVIIIème siècle, indifférente aux convenances et aux normes qui régissent le comportement féminin, épaulée par sa meilleure amie Alicia, une Américaine en exil, Lady Susan Vernon intrigue à la fois pour marier sa fille Frederica à un gentleman farmer aussi riche que stupide et épouser le jeune et sémillant Sir Réginald de Courcy, frère de sa belle-sœur. Tout en maintenant l’intérêt que lui témoigne son amant Lord Manwauring, un homme marié.
Points forts
- Son héroïne envoûtante, amorale, séduisante, irritante… à la Scarlett O’Hara, mais plus matoise, plus cultivée et plus raffinée.
- La splendeur des images, de la lumière et de la photo jointe au soin minutieux porté à la reconstitution des décors et des costumes.
- Le jeu so british et parfait en tout point des acteurs.
- Un feu d’artifice de mots d’auteur. On croirait le texte emprunté à un mix d’Oscar Wilde pour le regard acide, Guitry et Jean Anouilh pour les formules choc et l’ironie, Beaumarchais pour l’élégance de la subversion, Marivaux pour l’intrigue et Feydeau pour les situations. Ce film est autant à écouter (en VF) ou à lire si VO (recommandée en raison du charme succulent des accents) qu’à regarder. Un humour, constant chez Jane Austen trop souvent ramené au second plan dans les adaptations cinématographiques de ses autres romans (Orgueil et préjugés, Raison et sentiments…)
- Une légèreté de ton qui fait passer de façon jubilatoire et délicieuse une critique acérée de l’interdiction faite aux femmes de travailler et fustige sublimement les stupidité, vanité et naïveté des hommes manipulés par la gente féminine alors même qu’ils contrôlent l’accès à la propriété foncière, l’argent et la transmission de l’héritage, tandis que les femmes s’en trouvent exclues, dépossédées du fait des règles de primogéniture et de substitution qui privilégient la branche mâle.
Quelques réserves
Aussi jolie soit-elle, les plus difficiles pourront trouver un peu lisse le jeu de Kate Beckinsale si on se rappelle la performance hors norme de Glen Close dans Les liaisons dangereuses. Mais c’est bien là la seule réserve qu’on émettra...
Encore un mot...
Pour goûter à sa juste mesure cette œuvre filmique comme le génie anticipateur de Jane Austen, il faut avoir en tête que l’auteure a écrit ce 1er roman très bref -41 lettres + conclusion du narrateur- entre 1793 et 1795, à l’âge de 19 ans, dans le style épistolaire en vogue à l’époque (cf Les Liaisons dangereuses de Chorderlos de Laclos dont il est un cousin immédiat), ce qui la situe de facto dans la lignée féministe d’une Olympe de Gouge. Il ne sera étrangement publié qu’en 1871 grâce à son neveu James Edward Austen-Leigh, opposant du même coup ironiquement son héroïne imbattable en duplicité, fourberie, cupidité, rouerie, absence de sentiment maternel, vanité, conscience de sa beauté, de sa supériorité intellectuelle et de sa vivacité d’esprit (le « wit »)… à l’idéal de la femme de l’époque victorienne qui devait aux hommes soumission, docilité, douceur, abnégation, pudeur, respect des convenances et des bienséances, inhibition du désir et des passions. Nous laisserons à nos lecteurs le soin d’apprécier tout ce en quoi ce combat reste actuel...
Une phrase
La 1ère, parce qu’elle décode parfaitement la psychologie de l’héroïne, la 2nde car elle donne le ton humoristique très british de l’ensemble:
- ‘‘Une Vernon n’aura jamais faim.’’. Lady Susan Vernon.
- "Cooper le poète rédige aussi des vers ? J’en suis impressionné”. Sir James Martin.
L'auteur
Diplômé d’Histoire à Harvard où il est l’un des rédacteurs duHarvard Crimson, Whit Stillman travaille dans l’édition et le journalisme avant de diriger une agence représentant des artistes comme Sempé et Pierre Le-Tan (auteur des affiches de plusieurs de ses films). Il débute dans le cinéma en Espagne comme agent chargé des ventes internationales de films d’auteurs hispaniques avant de jouer dans leurs œuvres.
Inspiré de faits réels et considéré comme le premier d’une trilogie regroupant Barcelona (1994) et Les derniers jours du disco (1998), déjà avec Kate Beckinsale et Chloë Sevigny… son premier film, Metropolitan (1990), racontant l'histoire d’un adepte du socialiste Charles Fourier introduit à la "Sally Fowler Rat Pack" (SFRP), un petit groupe de BCBG qui fait le tour des bals, est nommé à l’Oscar du meilleur scénario original et gagne le New York Film Critics Circle Award de la meilleure réalisation. S’ensuit en 2011 Damsels in distress avec Greta Gerwig. En 2014, Whit Stillman écrit et réalise l’épisode pilote de la comédie dramatique The Cosmopolitans pour Amazon Studios, avec Adam Brody et Chloë Sevigny. Artiste proté, son premier roman, The Last Days of Disco, with Cocktails at Petrossian Afterward gagne le prix Fitzgerald 2014 en France.Love and friendship est son 5ème long-métrage de cinéma.
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