Carbone

Polar puissamment ancré dans la réalité et formidablement interprété.
De
Olivier Marchal
Avec
Benoit Magimel, Michael Youn, Gérard Depardieu, Laura Smet, Gringe, Dani
Notre recommandation
4/5

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Thème

Inspiré par une affaire réelle, le film met en scène  Antoine Roca ( Benoît Magimel), un patron de PME pour qui rien ne va plus. Méprisé  depuis toujours par son écrasant beau-père (Gérard Depardieu), il est quitté par sa femme, et, malgré ses efforts, son entreprise sombre inexorablement dans la faillite. Au bout du rouleau, Antoine Roca décide de remiser dans sa poche son honnêteté et sa sincérité.  Pour tenter de sauver sa boîte, il va s’acoquiner avec les frères Wizman, deux ingérables petits malfrats avec lesquels il joue au poker (Gringe et Idir Chender) pour  monter avec eux une arnaque dont il pense qu’elle va être indécelable. Evidemment, les choses vont mal tourner...

Points forts

- C’est une belle idée que d’avoir appuyé ce scénario  sur une fraude aujourd’hui oubliée, celle d’une gigantesque  arnaque à la taxe carbone qui se solda pour la France par un détournements de fonds de plus de 1,8 milliards d’euros et de presque huit milliards pour l’Europe.  Sauf exception, à part d’en avoir subi financièrement les conséquences, le contribuable  français n’en avait, en général, ni compris, ni retenu grand chose. A l’aide d’Emmanuel Nakache, Olivier Marchal nous  remémore  cette escroquerie et nous l’explique.

 Et non seulement le cinéaste  va démêler l’écheveau de cette nébuleuse mais passionnante  affaire, mais il va s’en servir comme d’un tremplin pour son nouveau film. Un polar comme il sait les faire, noir évidemment, tendu, violent et implacable.

- Pour ce film, la caméra d'Olivier Marchal s’est faite légère. Résultat : une mise en scène fluide, qui passe avec une belle  virtuosité d’une scène à l‘autre et qui, même, s’accélère au fur et à mesure du déroulement de l’histoire. Le spectateur ne pourra plus quitter l’écran des yeux.

- Une autre grande réussite du film est sa distribution. 

Et d’abord, Benoît Magimel. Dans le rôle d’un chef d’entreprise pris dans les rets d’une histoire qui va l’engloutir, le comédien est meilleur que jamais, à la fois d’une fragilité de cristal et d’une détermination d’airain. Il a la densité d’un Ventura, la sensibilité d’un Dewaere et l’intelligence fiévreuse d’un Léotard. Autant dire qu’il est parfait et contribue pour beaucoup dans la réussite du film. Comme toujours, Gérard Depardieu, est, lui aussi, formidable, qui donne à son rôle épaisseur  et noirceur dans une sobriété de jeu impressionnante. 

Aux côtés de ce duo d’acteurs phares: la chanteuse Dani, incroyable d’ambiguïté dans son rôle de mère mouillée avec la pègre; Catherine Arditi, bouleversante en  « mama » juive dépassée par les évènements;  Michaël Youn, qui sort avec brio de son registre d’amuseur habituel pour composer un avocat d’une bienveillance inattendue; et  Idir Chender  qui a trouvé avec son personnage de malfrat écervelé et drogué, le meilleur emploi de sa carrière.

Quelques réserves

- Dommage qu’au début du film, le scénario ait un peu de mal à dénouer les fils de la fraude…

- Dommage aussi qu’Olivier Marchal ait cédé à la tentation de certains clichés des films noirs, comme ceux, par exemple des scènes de drague dans des boites de nuit mal famées ou de scènes d’amour entre le héros et une fille perdue, rencontrée par hasard…

Encore un mot...

1- Le premier mot, sur Carbone.

On ne change pas une recette qui marche, mais on peut chercher à l’améliorer. C’est ce qu’a dû se dire Olivier Marchal, qui, après une absence de six ans, revient sur grand écran comme réalisateur-scénariste.  En ce qui concerne la recette, cet ancien « flic » reconverti cinéaste a choisi celle qui a fait sa réputation, celle du polar, mais  il l’a améliorée en  la mitonnant hors du traditionnel  cadre  « policiers contre voyous », et en la parfumant de faits réels, qui lui donnent ici, une consistance  et une saveur nouvelles. Chic ! il signe avec ce Carbone son meilleur film.

2- Le deuxième sur Les Conquérantes. 

Signé Petra Biondina Volpe, ce film raconte comment  en 1971, dans un petit village suisse encore soumis à un ordre patriarcal (malgré Mai 68 et Woodstock ), une femme, jusque là mère  et épouse soumise, va se transformer en suffragette  et  inciter les femmes de sa commune à se révolter contre un système qui leur  refuse le droit de vote  et qui  leur interdit, entre autres, de travailler sans l’aval de leur mari.

Tour à tour grave, amusante, touchante, satirique et audacieuse, cette comédie sociale a été ovationnée dans tous les festivals internationaux où elle a été projetée. Elle va représenter la Suisse  à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère.  C’est dire sa qualité filmique, scénaristique et d’interprétation.  

      RECOMMANDATION: EXCELLENT

3- Le troisième, sur «  D’après une histoire vraie ».  

Tiré du roman éponyme de Delphine de Vigan, ce film était très attendu. D’abord parce qu’il est inspiré  d’un livre fascinant sur la vampirisation d’une écrivaine par une femme névrosée; ensuite parce qu’il est signé, pour sa réalisation, par un cinéaste parmi les plus brillants et adulés  (à juste titre) de sa génération, Roman Polanski…

La déception est à la hauteur de l’attente. Pas un instant on ne croit à cette histoire qui semble « pliée » dès qu’apparait la « méchante » névrosée ( Eva Green, une seule note de jeu, c’est bien monocorde !).

Non seulement tout est cousu de fil blanc depuis pratiquement le début du film, mais on s’ennuie ferme, malgré la belle et sensible  prestation d’Emmanuelle Seigner, vaillamment convaincante dans son rôle de romancière malmenée.  

Qu’est-il donc arrivé à Roman Polanski ? 

        RECOMMANDATION: A LA RIGUEUR

Une phrase

«  Pour moi, Benoit Magimel est le meilleur acteur de sa génération : un gamin hypersensible et totalement perdu, qui a besoin d’être guidé et soutenu…Benoit est beau, touchant, fragile, et je savais qu’avec lui, le personnage d’Antoine Roca serait racheté par le public » (Olivier Marchal, réalisateur)

L'auteur

Dans le cinéma français, les dialoguistes recèlent  de nombreux anciens « flics ». C’est le cas d’Olivier Marchal. Sauf que,  contrairement à ses anciens collègues, lui n’a pas quitté la « Grande Maison » pour écrire, il l’a quittée, avant tout, pour jouer. Le démon de l’écriture, puis celui de la réalisation sont venus après.

Né le 14 novembre 1958 à Talence, en Gironde, de parents pâtissiers,  Olivier Marchal découvre le théâtre à l’âge de treize ans. Paradoxalement pourtant, le bac en poche, il commence par passer le concours d’inspecteur de police et intègre (brillamment) la PJ. Deux ans plus tard, en 1982, épuisé par les affaires sordides, il  rejoint les RG, qu’il quitte en 1985 pour intégrer la PJ. 

Sa petite amie de l’époque, Michèle Laroque, l’incite à revenir à ses premières amours, la scène. Il va donc  entamer une double vie: le jour, il prend des cours de théâtre; la nuit,  il  est inspecteur. 

Après plusieurs petits rôles, il quitte définitivement la police et se lance dans le théâtre et le cinéma…

Il joue beaucoup, et se décide enfin à réaliser. C’est d’abord Gangster, en  2002, puis en 2004,  36 quai des orfèvres, qui assoit sa réputation de cinéaste.

Carbone est son sixième long métrage pour le cinéma. La télévision lui doit, entre autres, comme scénariste et réalisateur, de nombreux épisodes de la série Braquo. 

Olivier Marchal  est actuellement au théâtre, en tournée avec Nénesse de Aziz Chouaki.

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