Reflections Redux
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Thème
S’agit-il d’une exposition au sens coutumier du terme ? Pas exactement. Plutôt d’une immersion sensitive dans l’univers croisé de la vidéo, des chorégraphies de Benjamin Millepied et de l’art visuel de Barbara Kruger.
Points forts
1) Tout d’abord, le lieu. Le Studio des Acacias, trois étages tout blanc dans une rue commerçante du XVIIe arrondissement de Paris, pas très loin de l’Etoile. Salle de boxe dans les années 40, lieu de rencontre des yéyé dans les années 60, il devient un studio photo renommé, le Studio Carnot, qui accueille les très grands de la profession (Irving Penn, Richard Avedon, Guy Bourdin…) et abrite le Studio Harcourt de 1992 à 2002.
Repris par un passionné d’art contemporain depuis 2014, l’entrepreneur Paul-Emmanuel Reiffers, président du groupe Mazarine, une agence multi-services pour les grandes marques du luxe, il est aujourd’hui un lieu d’exposition, de rencontre et de dialogue entre des courants artistiques de nature différente.
2) Au rez-de-chaussée, tous en scène ! Les visiteurs pénètrent sur le dispositif scénique que l’artiste Barbara Kruger avait conçu pour le ballet « Reflections », chorégraphié par Benjamin Millepied en 2013. Au sol et sur les deux murs latéraux, on retrouve ses grands mots blancs inscrits sur un fond rouge cerise, la marque de son style : « Go », « Stay » et son slogan si joli « Think of me thinking of you ».
Tout au fond, une petite scène noire semble avoir été installée, mais ce n’est qu’une illusion troublante. Quatre extraits du ballet sont projetés en hologramme, grandeur nature. Les danseurs ou plutôt leurs fantômes répètent devant nous, à portée de main. L’expérience est à la fois poignante et stimulante. Comme si Benjamin Millepied tendait la main aux amateurs de danse et à ceux qui la méconnaissent, en leur disant à tous, généreusement, venez, approchez, pénétrez dans mon univers, entrez dans ma danse… Une telle invitation ne se refuse pas.
3) À l’étage, c’est le concept inverse. La danse est toujours filmée mais elle quitte les théâtres et les maisons d’opéra pour s’introduire dans l’univers quotidien des visiteurs : une maison, une rue, un site industriel, une plage… Il s’agit en quelque sorte de « chorégraphies hors les murs », à la manière de « West Side Story » où Jerome Robbins (un des maîtres de Benjamin Millepied) faisait évoluer ses danseurs dans les rues de New York.
Le sol est recouvert d’une moquette noire. Six téléviseurs sont posés par terre, cinq au format 16/9 et un en 4/3, tous équipés de deux casques audio. De gros fauteuils poire permettent aux visiteurs de s’installer comme bon leur semble. En boucle sont diffusés des films courts, réalisés pour la plupart par Benjamin Millepied avec sa compagnie le L.A. Dance Project, dans des décors quotidiens, naturels, en extérieur.
4) Gros coup de cœur, parmi tant d’autres, pour le petit film « Passage to Dawn : The Story of Daphnis & Chloe », tourné dans une maison d’architecte. Des scènes de couple en plusieurs séquences, dans une salle à manger, une salle de bain, aux abords d’une piscine privée. Des plans souvent fixes mais une position de caméra toujours judicieuse, le tout filmé dans un ralenti magnifique. Et en bande sonore, une sublime chanson inédite des London Grammar.
Quelques réserves
Dommage que cet événement soit si court, sept petits jours et puis s’en va… Décidément, même filmée, la danse reste un art éphémère...
Encore un mot...
« Reflections Redux » est une expérience à ressentir plus qu’une exposition à regarder.
Venez à la danse, semble nous dire le grand chorégraphe Benjamin Millepied, car de toute façon grâce aux nouvelles technologies, grâce à mon envie de la faire sortir des théâtres, la danse viendra à vous.
Et c’est tant mieux : Que de beauté !
L'auteur
- Danseur étoile du New York City Ballet et ex-directeur de la danse de l’Opéra de Paris, Benjamin Millepied, tout juste 40 ans, est un chorégraphe à la renommée internationale. Il a fondé à Los Angeles sa propre compagnie, intitulée L.A. Dance Project. Sa nouvelle création, « Souvenir d’un lieu cher », pour l’American Ballet Theatre commence ces jours-ci au Lincoln Center à New York. Il prépare actuellement le tournage de son premier film, tiré de « Carmen ».
- Barbara Kruger, née en 1945, est certainement l’une des plus grandes artistes conceptuelles américaines contemporaines. Très tôt elle se passionne pour les arts visuels, le design graphique, la poésie et l’écriture. Longtemps graphiste, elle est célèbre pour ses photos-montages en noir et blanc, assortis de slogans mordants et provocants, rédigés en blanc sur fond rouge.
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