Pharaon des deux terres, l’épopée africaine des rois de Napata
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Thème
Au VIIIème siècle av. J.-C., au Soudan, le roi Piânkhy construit son royaume autour de la ville de Napata. Vers 730, il entreprend la conquête de l’Égypte et inaugure la domination des souverains kouchites, pharaons de la 25e dynastie, sur un royaume s’étendant du delta du Nil jusqu’au confluent du Nil Blanc et du Nil Bleu. Première exposition en France consacrée à la période napatéenne, elle éclaire le rôle majeur de cet immense territoire, son développement et ses relations avec l’Egypte, tant militaires qu’architecturales, religieuses et artistiques. A travers les statues et stèles multi millénaires, le Hall Napoléon du musée du Louvre retrace les grandes étapes d’une conquête qui unifia, pour quelques dizaines d’années, les royaumes de Kouch et d’Egypte.
Points forts
A bien des égards, le titre de l’exposition peut induire en erreur : au fil des sept grandes étapes du parcours de visite, elle s’intéresse moins à des pharaons qu’à des rois, tandis que les « deux terres » ne correspondent pas à la Haute et à la Basse Egypte, mais bien aux royaumes égyptien et kouchite (actuel nord du Soudan). Il s’agit donc d’un sujet très précis, concentré sur une cinquantaine d’années, où des souverains étrangers, les rois de Napata, ont dominé l’Egypte entre la quatrième cataracte et le delta du Nil, près de Memphis.
Elle n’en est pas moins fournie en objets et documents archéologiques : on y trouve des statues, de forme humaine, animale ou hybride, ainsi que des stèles de pierre, incrustées de hiéroglyphes. C’est l’occasion de prononcer des noms de personnages et de lieux souvent ignorés du grand public (Piânkhi, Chabaka, Taharqa, Napata…) et d’attirer l’attention sur les travaux scientifiques menées depuis le XIXe siècle en ces terres. Des pionniers tels Champollion (dont on célèbre le bicentenaire du déchiffrement des hiéroglyphes) aux contemporains de la mission du musée du Louvre au Soudan, l’exposition propose de découvrir plusieurs documents d’archives (dessins, estampages, ouvrages de synthèse…). Elle met ainsi en lumière la richesse des fouilles réalisées sur le site de Mouweis et prochainement à El-Hassa, à quelques kilomètres des pyramides de Méroé.
Le projet de médiation historique et culturelle permet bien d’appréhender les enjeux de cette courte mais intense période de l’histoire de l’Egypte antique. Le parcours de visite est relativement fluide, notamment grâce à l’absence de dispositifs interactifs et audiovisuels. Il suit une progression à la fois chronologique, géographique (plusieurs espaces présentés successivement) et thématique (conquête militaire, productions artistiques et religieuses…). Des repères clairs et précis sont systématiquement présentés et offrent même la possibilité de s’essayer à la lecture de hiéroglyphes (des citations issues des œuvres exposées sont traduites). L’exposition s’achève sur une présentation de l’opéra de Verdi, Aïda, directement inspiré de la période de l’Egypte napatéenne : les dessins des costumes et le livret réalisés par l’égyptologue Auguste Mariette témoignent ainsi de la fascination suscitée par l’Orient depuis le XIXe siècle.
Quelques réserves
Malgré les nombreuses œuvres prêtées au musée du Louvre (en provenance des musées de Londres, Berlin, New York et Khartoum), on peut regretter que les pièces maîtresses de cette exposition ne soient que des reproductions, notamment la statue du roi Taharqa à l’entrée du Hall Napoléon, et le groupe de statues en granite découvertes à Doukki Gel à la toute fin, conservées au musée archéologique de Kerma au Soudan. La qualité des répliques est remarquable, mais elles n’ont ni l’aura, ni le charme des reliques multi millénaires que l’on retrouve dans d’autres œuvres exposées.
Encore un mot...
A travers cette exposition événement, le musée du Louvre met à l’honneur des souverains africains souvent restés dans l’ombre des pharaons du Nouvel Empire. Un sujet pointu mais richement illustré qui invite à découvrir la construction d’un royaume multiculturel, entre conquêtes militaires, créations artistiques et traditions religieuses.
Une phrase
« Dominées longtemps par l’Égypte, les régions situées au sud de la première cataracte obtiennent leur autonomie lorsque les Égyptiens abandonnent ces zones à la fin du Nouvel Empire. Un royaume indépendant s’y constitue peu à peu, il tente rapidement d’établir son autorité sur l’Égypte même. La principale tentative est l’œuvre de Piânkhy dont la Stèle Triomphale raconte dans le détail ses campagnes militaires menées jusqu’à Memphis. Son frère et successeur réussit à unifier Soudan et Égypte et crée la 25ème dynastie », extrait du dossier pédagogique de l’exposition.
L'auteur
Commissaire de l’exposition : Vincent Rondot, égyptologue français, directeur de recherche au CNRS, président de la société internationale des études nubiennes et membre du comité de direction de la société française d’égyptologie. En 2014, il est nommé directeur du département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre.
Assisté de Nadia Licitra, Faïza Drici et Hélène Guichard.
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