Man Ray et la mode
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Thème
Entre-les-deux-guerres à Paris, Man Ray révolutionne la photographie de mode en lui donnant une dimension artistique et poétique.
Cette exposition - qui succède aux deux expositions marseillaises du début de l'année 2020- explore deux thèmes principaux. D'une part l'oeuvre trop méconnue de Man Ray en tant que photographe professionnel de la mode et, d'autre part, l'émergence d'un phénomène de société après la 1ère Guerre Mondiale: la place prise par la mode au sens large, non seulement les vêtements mais aussi le maquillage, la coiffure, la façon de bouger...un nouveau style de vie au féminin et sa publicité dans la presse.
Le parcours au musée du Luxembourg est chronologique : Du portrait des années 1920 à la photographie de mode; La montée de la mode et la publicité; L'apogée d'un photographe de mode, les années Bazaar.
C'est en 1921 à 31 ans que Man Ray, peintre sans ressources à New-York, tente sa chance à Paris où des amis l'attendent. Pour subsister, il commence par photographier ses proches (Alice Prin la future Kiki de Montparnasse, Gabrièle Buffet-Picabia), puis ses compatriotes (Peggy Guggenheim, Nancy Cunard) et enfin tout le milieu parisien mondain. Ces dames lui ouvrent les portes des maisons de haute-couture (Paul Poiret, Gabrielle Chanel, Jeanne Lanvin, Worth, Lucien Lelong... et plus tard Jean Patou, Elsa Schiaparelli). Il y photographie mannequins, clientes, et ses amies vêtues des robes des couturiers. « Pour satisfaire son inspiration, il n'hésite pas à employer aussi ses compagnes, Kiki, puis Lee Miller, pour passer subtilement du portrait à la photographie de mode et abandonner les formes compassées de ses débuts pour adopter un style plus spontané, où s'exprime davantage la sensualité du corps féminin » (dossier de presse).
Les femmes ont une place essentielle dans sa vie. Dandy séducteur, Man Ray adore leurs corps, leurs attitudes, leur sex-appeal. Ses photos artistiques les mettent en lumière, les subliment et en offrent une vision onirique et érotique.
Pour Man Ray, la photographie est un art mineur qu'il ne pratique que pour des raisons financières. Pour se démarquer des photographes «ordinaires» et prouver que, lui, est un artiste-photographe il dé-réalise son sujet et cherche à scandaliser, à provoquer. Il intègre son vocabulaire surréaliste, étrangeté et magie, à ses photos de mode. «Je voulais lier l'art à la mode», dira-t-il.
C'est aussi un bon technicien et un innovateur. Il utilise et améliore des procédés déjà existants mais peu mis en pratique: le rayogramme («photographie sans objectif» qui modifie les intensités de couleur), la solarisation (exposition à la lumière du négatif ou de l'épreuve au cours du développement), la surimpression (clichés successifs sur la même plaque ou négatifs superposés au tirage), les photomontages, les recadrages.
A partir des années 30, Alexey Brodovitch, le directeur de la revue new-yorkaise Harper's Bazaar, fait sans cesse appel aux talents de Man Ray et lui permet de mener un grand train de vie à Paris.
Harper's Bazaar est, en effet, à ce moment-là, à la tête de presque tout le marché de la revue de mode aux Etats-Unis. Mais Man Ray n'aime pas les contraintes. Lassé de répondre à des commandes publicitaires, il rompt en 1939 son contrat avec Harper's Bazaar.
Dans le sillage de Man Ray cette exposition met en scène les évolutions stylistiques féminines de la mode de 1920 à 1939 : La garçonne des années 1920; La femme épanouie des années 1930.
Et Man Ray, témoin privilégié, a su merveilleusement capter ces évolutions, ces nouvelles manières de vivre qui caractérisent l'Entre-deux-guerres.
Points forts
- La patte Dada de Man Ray illustrée dès la première salle par deux de ses objets insolites (un fer à repasser à la semelle piquetée comme le dos d'un porc-épic, un enchevêtrement de 32 cintres très haut perchés).
-La scénographie sobre, classique, qui, sur des cimaises blanches, met en valeur les superbes photos de femmes déesses de la mode.
-Les grandes vitrines où sont exposées de somptueuses robes, modèles griffés des maisons prestigieuses de l'époque.
-Le parcours multimédia avec chroniques mondaines, extraits de films publicitaires, images variées.
Quelques réserves
Certes il faut aimer les photos en noir et blanc. Mais les camaïeux de gris, les jeux d’ombre et de transparence sont admirables.
Encore un mot...
On sort ébloui de cette exposition qui, semble-t-il, reflète bien la personnalité de Man Ray et les paradoxes de ces années 1920-1939 débridées mais aussi raffinées : humour et rigueur, anticonformisme et classicisme...
Et on se demande si Man Ray ne demeure pas le maître absolu de la photographie de mode. A-t-on fait mieux depuis?
L'auteur
Man Ray (pseudonyme d'Emmanuel Radnitsky), né en 1890 à Philadelphie, est un peintre, un réalisateur de cinéma et l'un des rares artistes photographes du surréalisme. Il s'installe de 1911 à 1921 à New-York où il pratique le dessin, la gravure, la photographie et découvre grâce à Marcel Duchamp les avant-gardes artistiques européennes et le surréalisme. En 1921, il débarque à Paris chez Marcel Duchamp qui l'introduit dans le milieu de l'avant-garde et dans le Tout-Paris des Années folles. En 1939, il quitte la France pour New-York. Puis il décide de partir à Tahiti mais, finalement, il s'arrête en chemin à Los Angeles où il revient à la peinture et cesse de photographier. De retour à Paris en 1951, il se consacre à sa vocation de peintre qui ne l'a jamais quitté - bien qu’il expérimente la photographie en couleur. En 1961, il reçoit la médaille d'or de la photographie à la Biennale de Venise et en 1962 son oeuvre photographique fait l'objet d'une exposition à la Bibliothèque nationale. Man Ray meurt à Paris en 1976.
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