L’AGE d’OR de la PEINTURE ANGLAISE De Reynolds à Turner
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Une sélection d’œuvres prêtée par la Tate Britain éclaire la scène artistique anglaise de la période de son Âge d’or. Sous le règne de George III, entre 1760 et 1820, le pays s’affirme comme puissance et la société britannique connaît une transformation décisive où l’art sort de la sphère privée pour devenir public. Les peintres de cette génération cherchent à rivaliser avec les écoles européennes les plus prestigieuses tout en cultivant une identité proprement britannique. En 1768, sur le modèle français, est fondée la Royal Academy of Arts, témoin d’une ambition esthétique nouvelle de la société civile. Outre la noblesse, les nouveaux acteurs du commerce et de l’industrie créent une demande accrue qui fait émerger de fortes personnalités sur le marché de l’art. C’est l’époque de la grandeur et du sublime.
Sept salles offrent un large panorama de l’évolution de cette époque jusqu’au début du XIXe siècle.
1. Reynolds et Gainsborough, face à face.
Les deux artistes majeurs dans l' Angleterre de la deuxième moitié du XVIIIe siècle excellent dans l’art du portrait.
Joshua Reynolds (1723-1792) place ses sujets, souvent en pied, dans un paysage (remarquable Lady Bampfylde).
Dans la même lignée, Thomas Gainsborough (1727-1788) peint des grands portraits féminins sur fond de paysage (Lady Bate-Dudley).
L’un et l’autre diffèrent pourtant dans leur approche artistique, Reynolds, à la recherche d’idéal et d’intemporel, s’inspire souvent des thèmes de l’Antiquité par des éléments classiques et symboliques. Gainsborough, subtil coloriste, également paysagiste de grand talent, s’en différencie par une approche plus moderne qui s’apparente souvent à l’ébauche. Tous deux membres fondateurs de la Royal Academy ont été fortement marqués par Anton Van Dyck très célèbre en Angleterre au XVIIe siècle.
2. Portraits, images d’une société prospère.
Avec l’économie croissante se développe un marché florissant pour les portraitistes. Francis Cotes Portrait de dame, 1768, très apprécié par le roi, fait partie du premier noyau de la Royal Academy. Son ascension est brusquement stoppée par sa mort en 1770. D’autres noms illustrent cette période fertile ; Johan Zoffany, Mrs. Woodhull, vers 1770, dans la lignée de Reynolds. George Romney, portraitiste en vogue, William Beechey, Thomas Law Hodges, ce portrait masculin considéré comme l’un de ses meilleurs, exposé à la Royal Academy en 1795. Ou encore John Hoppner, Jane Elisabeth, 1797, un effet de lumière dramatique donne à ce portrait une atmosphère pré-romantique. L’inspiration de Titien et Van Dyck y est perceptible. Il excelle aussi dans les portraits d’enfants.
3. Dynasties et familles, images d’un entre soi.
Entre 1730 et 1740 apparaissent des portraits de groupe proches de la scène de genre, plutôt de petit format, rappelant l’art hollandais et flamand. Des artistes comme Johan Zoffany ( Mr.et Mrs. Dalton avec leur nièce, 1765-1768) et Francis Wheatley (Famille dans un paysage, 1775), font évoluer la conversation piece (scènes des conversation) vers plus de naturel et de liberté. Ces portraits informels de familles ou de groupes d’amis soulignent un nouvel esprit inspiré de David Hume et Adam Smith d’harmonie sociale où s’estompent les distinctions de rang.
4. Le spectacle de la nature.
La scène artistique sort de l’espace clos des intérieurs familiaux pour trouver une inspiration nouvelle dans le spectacle du monde extérieur. Les règles académiques strictes s’effacent peu à peu pour laisser place à une autre pratique de la peinture de paysage, subjective, sensible et dynamique. Croquer sur le motif sera un principe essentiel pour toute une génération de peintres qui sillonnent la campagne en quête de sujets. Les bords de la Tamise, les vues champêtres ou les scènes de la vie rurale participent au sentiment de l’identité britannique.
Francis Cotes, Constable (Malvern Hall, dans le Warwickshire, 1809), aussi Gainsborough, en sont les figures marquantes de cette esthétique nouvelle. La société de consommation anglaise naissante est friande de cette peinture de paysage.
Faute de place, je ne peux détailler ici d’autres salles, en laissant au visiteur la surprise.
5. Peindre à l’Aquarelle
6. Aux frontières de l’Empire
7. La peinture d’Histoire, contradictions et compromis
Points forts
Dans les grands portraits, remarquables dans leur exécution, se concentre tout le raffinement de la représentation de la société anglaise, du milieu aristocratique ou de la bourgeoisie marchande naissante.
Quelques aquarelles, trop peu, mais très représentatives de cette sensibilité britannique particulière pour leurs paysages, leur Arcadie.
Joshua Reynolds, Master Crewe, en Henry VIII, vers 1775. Un des tableaux les plus admirés de Reynolds exposé à la Royal Academy. Le déguisement de l’enfant et sa pose, les jambes écartées, sont directement inspirés du célèbre portrait d’Henry VIII par Hans Holbein le Jeune. Son pendant Miss Crewe, vers 1775. Cette petite fille de l’aristocratie porte un déguisement, comme son frère, de jeune vendeuse de fraises typique du Londres au XVIIIe siècle.
Quelques réserves
Le sous-titre de l’exposition indique « De Reynolds à Turner », mais ce dernier n’est présent dans cette exposition que par quelques aquarelles et deux huiles, La Tamise près de Walton Bridge de 1805, de petit format, et de dimension grandiose « La destruction de Sodome », exposé en 1805.
On peut regretter ne pas pouvoir admirer ici davantage des fameuses toiles de la Tate Gallery du « peintre de la lumière », ce visionnaire romantique, qui a révolutionné la peinture du début du XIXe siècle, annonçant déjà l’impressionnisme.
Encore un mot...
Je pense qu’un public cultivé français pourrait s’étonner du style particulièrement académique rose poudré de ces peintures anglaises du XVIIIe siècle, présentées comme chefs d’œuvre de la Tate Britain. Il est vrai que la Royal Academy of Arts fut créée en ces temps, un siècle après l’Académie de peinture française. Mais certains visiteurs pourraient être tentés de comparer ces toiles avec la diversité de nos Watteau, Boucher, Chardin et autres Fragonard…
Une illustration
Une phrase
« Si notre nation parvient un jour à produire assez de génie pour mériter qu’on nous distingue du titre honorable d’école anglaise, le nom de Gainsborough sera transmis à la postérité dans l’histoire de l’art, parmi les premiers de cette école naissante. » Reynolds au sujet de Gainsborough.
«Maudit soit-il ! Quelle variété ! » Gainsborough au sujet de Reynolds.
Commentaires
Exposition très décevante.
-Soit vous connaissez déjà la peinture anglaise et vous n'y trouverez aucune de ces toiles merveilleuses qu'on peut voir à Londres.
- soit vous ne la connaissez pas, et ce n'est pas dans cette exposition que vous pourrez faire connaissance avec cette grande peinture anglaise: vous n'aurez qu'une vision bien pâle de l'humour décapant de Gainsborough (avec ses conversation peaces qui peuvent rivaliser avec Longhi pour la critique de la société anglaise); vous n'approcherez ni de près ni de loin ce qui fait la beauté et la grandeur de Turner. Reynolds est quant à lui un peu mieux représentés, mais pour Constable, c'est presque comme s'il n'y avait rien. On parle de Van Dyck, ce merveilleux hollandais établi à Londres qui a si bien magnifié l'art du portrait et qui a inspiré tous les portraitistes anglais, mais vous n'en verrez pas un seul !
Bref, ne perdez pas votre temps à venir voir cette exposition. Elle ne grandit pas le musée du Luxembourg (ni le Sénat par la même occasion), et la Tate Gallery devrait se cacher sous le tapis pour oser envoyer en France des tableaux si peu représentatifs de la grandeur de la peinture anglaise en cette période qui est pourtant réellement un âge d'or de la peinture en Angleterre.
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