Le continent de la douceur
495 pages
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Thème
Aurélien Bellanger nous livre un récit polyphonique qui tente de donner une définition de l’Europe. Entrecroisant l’histoire de plusieurs personnages autour d’une petite principauté imaginaire, le Royaume de Karst, située aux confins de l’Autriche et de la Slovénie, il construit son roman sur le destin croisé de ses personnages, la petite histoire, avec celui du continent européen, l’histoire avec un grand H. Histoire, philosophie, politique, mathématiques, progrès, destinée, il construit avec dextérité une fable aux entrées multiples.
Points forts
* C’est brillant, savant même et savamment orchestré. L’histoire du royaume de Karst depuis 50 ans est racontée à travers celle de ses principaux protagonistes, un mathématicien génial mystérieusement disparu, une banquière américaine ambitieuse, l’héritier du Royaume, un écrivain survolté et un fils caché. La Principauté s’éveille lentement aux mythes de la construction européenne, en résonance avec les crises qui l’ont toujours secouée.
* Construire une intrigue autour de l’identité européenne est une vraie gageure : pari en partie rempli grâce à une brillante érudition, une finesse d’analyse et une mise en perspective de l’histoire qui témoignent d’une intelligence éclatante et multiple.
* La qualité d’Aurélien Bellanger, déjà cultivée dans ses deux précédents romans – La théorie de l’information et L’aménagement du territoire est de mêler en seul récit le développement d’une intrigue purement romanesque avec le développement extrêmement poussé de théories – concernant ici les mathématiques, l’intuitionnisme, la construction européenne.
Quelques réserves
* Le continent de la douceur est un peu moins réussi que ses deux précédents ouvrages – cités plus haut – et souffrent de la comparaison. L’intrigue est moins aboutie que la démonstration très documentée de ses théories.
* L’histoire des personnages manque un peu de chair, ce qui nuit à la compréhension de leurs actes et aux revirements de leurs motivations. Les théories avancées sont souvent assez abstraites, sur le mode des fiches Wikipédia. On y parle beaucoup (trop ?) de mathématiques pendant les deux premiers tiers du roman et assez peu d’Europe avant que le sujet principal du livre occupe enfin véritablement la dernière partie du livre.
Encore un mot...
Le livre stimule l’intelligence de son lecteur. « C’est mon côté profondément pas populiste ! A partir du moment où quelque chose m’intéresse, je me dis que ça doit intéresser tout le monde », dit-il.
Une phrase
« Le nationalisme lui était un sentiment étranger : elle aimait le Karst comme elle avait aimé New-York et Venise – non pour lever leur identité profonde mais parce qu’ils libéraient, justement, ceux qui les choisissaient comme patrie des lourdeurs bellicistes de l’identité ».
L'auteur
Aurélien Bellanger a 39 ans. Il est l’auteur d’une thèse de philosophie, « l’identification des individus dans les mondes possibles » et titulaire d’une chronique sur France Culture, dont une sélection est parue en 2019 sous le titres « la France ».
Outre trois romans ambitieux et salués par la critique, il a également écrit un essai, Michel Houellebecq, écrivain romantique et une pièce de théâtre, Eurodance.
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