La fabrique du crétin digital : les dangers des écrans pour nos enfants
432 p.
20 €
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Thème
En matière de consommation de contenus numériques par les plus jeunes, l'information sur leurs effets est-elle bien documentée et sincère ? C'est le point de départ de la réflexion du Docteur en neurosciences Michel Desmurget. Sa lecture de la littérature scientifique et ses recherches sur les usages des écrans d'ordinateurs, de smartphones ou de tablettes par les enfants le conduisent à exposer ce qu'il considère comme la désinformation concernant les effets de la révolution numérique sur les apprentissages.
Il oppose, dans sa démonstration, opinions et connaissances scientifiques fiables. Les conséquences, avérées par ces études, sur le sommeil, la santé physique et mentale, l'attention, l'acquisition de la sociabilité et des savoirs, sont exposées et invitent à une vigilance particulière, au risque de provoquer un désastre cognitif, comportemental et éducatif pour toute une génération. A noter, cet essai écrit avec beaucoup de "verdeur", ne contient pas de jargon propre à un public expert.
Points forts
* Un exposé rigoureusement structuré, dont voici la charpente : la première partie est consacrée à la construction du mythe de l'influence bénéfique des contenus numériques sur les jeunes générations, mythe assez largement soutenu par les médias, certains pédagogues et l'industrie digitale, dont les opinions reposent davantage sur des partis pris (jouer aux jeux vidéo améliore les performances scolaires ou désamorcent les pulsions criminelles…) que sur des données incontestables. La seconde partie décrit - études scientifiques à l'appui évidemment - en quoi des usages abusifs, répétés et précoces altèrent les aptitudes cognitives et sociales des enfants, en particulier des plus jeunes. Sa conclusion est un cri d'alarme contre l'"agression silencieuse", à laquelle il oppose "7 règles essentielles". Elles pourront paraître évidentes mais relèvent de ce que Desmurget qualifie de bonne "écologie familiale". Il ne faut pas manquer de les lire (P 339 et suivantes).
* Un titre délicieusement provocant et largement soutenu par l'analyse. Richement documenté (77 pages de biographie proposées en fin de livre !) et mené avec la rigueur d'un directeur de recherche de l'INSERM, son raisonnement est développé sans langue de bois et avec un humour grinçant, comme l'était son précédent essai sur un sujet connexe : TV Lobotomie.
* Très accessible formellement, ce "coup de gueule" s'en prend à la dictature de l'opinion et des lobbies du digital, dont les arguments sont contredits par les études épidémiologiques disponibles : "la conclusion […] de ces données est assez simple : les écrans sont un désastre."
Quelques réserves
A part une certaine propension à reprocher aux professionnels des médias de ne pas connaître ou d’ aborder de façon "partisane" les sujets dont ils parlent- en particulier les paradis promis de l'ère digitale - je ne vois aucun autre point faible à cet ouvrage !
Encore un mot...
Dénoncer le danger des écrans pour nos enfant - jugement de valeurs, procès en sorcellerie, combat d'arrière garde ? "Loyauté" ! répond Desmurget ; libre aux parents de faire ce qu'ils veulent, mais qu'ils le fassent en connaissance de cause ! Voici comment pourrait être résumée La fabrique du crétin digital, 432 pages de faits et de bon sens, décapantes, ultra-documentées- une des marques "de fabrique" de l'auteur.
Il ne s'agit pas ici d'interdire tout accès au numérique, mais de s'assurer que les temps d'usage sont maintenus sous le seuil de nocivité, dit-il en conclusion. Cet essai, qui apprend beaucoup sur les apprentissages de l'enfant, est à recommander chaudement aux grands-parents, pour la santé de leurs petits-enfants, aux parents, pour la "croissance heureuse" de leurs "juniors" ! France Inter, fin 2019, a qualifié ce travail de "livre de salubrité publique"!
Une phrase
"La consommation du numérique sous toutes ses formes – smartphones, tablettes, télévision, etc. – par les nouvelles générations est astronomique. Dès 2 ans, les enfants des pays occidentaux cumulent chaque jour presque 3 heures d’écran. Entre 8 et 12 ans, ils passent à près de 4 h 45. Entre 13 et 18 ans, ils frôlent les 6 h 45. En cumuls annuels, ces usages représentent autour de 1 000 heures pour un élève de maternelle (soit davantage que le volume horaire d’une année scolaire), 1 700 heures pour un écolier de cours moyen (2 années scolaires) et 2 400 heures pour un lycéen du secondaire (2,5 années scolaires)." P9
En épilogue : "Chacun de tes pas d'aujourd'hui est ta vie de demain." Wilhelm Reich, psychiatre et psychanalyste
[…] Ce que nous faisons subir à nos enfants est inexcusable. Jamais, sans doute, dans l'histoire de l'humanité, une telle expérience de décérébration n'avait été conduite à aussi grande échelle". P 339
"Pour se construire, [le cerveau] a besoin de tempérance sensorielle et de présence humaine. Or l'ubiquité digitale lui offre un monde inverse, fait d'un bombardement perceptif constant et d'une terrible paupérisation des relations interpersonnelles." P 341
L'auteur
Michel Desmurget est Directeur de Recherche à l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM), Docteur en neurosciences cognitives. Son parcours l'a conduit aux USA où il collaboré aux travaux du MIT et de l'Université de Californie à San Francisco. Il s'est spécialisé dans l'étude des effets des écrans sur le développement cognitif des enfants et a publié sur ce thème en 2012 le très remarqué TV lobotomie, dont le titre se passe de commentaire. La fabrique du crétin digital a reçu une mention spéciale lors de la remise du prix Femina fin 2019.
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