Un escalier de sable
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Thème
Dans un futur ressemblant furieusement à notre présent. Dans une partie de l’Afrique qui pourrait être le désert du Soudan. Une unité française de l’OTAN installe son camp retranché à proximité du cimetière de la ville d’Al-Jannah. Leur mission ? Assurer la protection des travailleurs internationaux chargés de reconstruire la cité, autrefois jardin d’Eden posé au milieu du désert, aujourd’hui ville fantôme à l’oued asséché.
Un premier soldat est tué par un tireur isolé. On entend une voix de femme chanter au loin. Malgré les précautions prises et les recherches entamées par les hommes du Colonel Rivelain, un deuxième militaire est tué, puis un troisième, et un quatrième. A chaque mort se fait entendre cette voix de femme qui chante, belle, triste et glaçante.
Points forts
Un escalier de sable est bâti sur un scenario d’une jolie robustesse et d’une grande finesse. Il repose une question initiale : qui tue ces soldats de la paix, et pourquoi ? Lorsque l’on pense trouver la réponse, c’est une autre question qui émerge, et ainsi de suite. Qui est ce mystérieux tireur ? Pourquoi cette voix de femme ? Que fait Madame Nicola, anglaise et propriétaire du dernier bar d’Al-Jannah, dans cette ville en ruines ? Quel rôle joue le « voisin du Nord », soi-disant neutre ? Que se passe-t-il dans les mystérieux territoires de l’Ouest…
L’intrigue s’enrichit au fur et à mesure de l’empilement de questions successives, poussant le lecteur à une « fuite en avant », à la recherche des réponses. La chute est superbe. Lorsque la dernière page nous apporte la solution de l’intrigue, nous nous rendons compte que les réponses avaient été savamment distillées tout au long de l’album, et que nous les avions sous les yeux quasiment depuis la première page.
Un escalier de sable nous propose un éventail de personnages qui se télescopent et cohabitent tant bien que mal dans ce décor de fin du monde sans limite mais donnant le sentiment d’un étouffant huis clos. Le Colonel Rivelain, militaire sans âge, tiraillé entre les devoirs de sa mission et les exigences d’un profond humanisme. Le Lieutenant Devarieux, femme officier qui trace sa route avec détermination dans un monde d’hommes. Un vieillard mystérieux détenteur de tous les savoirs et toutes les sagesses de l’Afrique. Un adolescent non moins mystérieux au mutisme magnétique. Le consul d’Afrique du Sud, diplomate trouble et ondulant au double ou triple jeu. Sammy, caporal par hasard, qui découvre le sens de la vie par le biais d’un amour impossible au milieu d’un pays en guerre…
Quelques réserves
Il est difficile de dire que cet album ait un véritable point faible. Peut-être pourrait-on concéder qu’il n’aborde aucun thème véritablement nouveau et qu’il est un assemblage de sujets déjà traités abondamment pas la littérature, la bande dessinée ou le cinéma. A ce sujet, on notera la filiation avec le superbe American Sniper, de Clint Eastwood, 2015 et le puissant Black Hawk Down (La Chute du Faucon Noir) de Ridley Scott, 2002. Mais cet assemblage est réalisé avec talent.
Encore un mot...
Il faut lire Un escalier de sable pour se perdre en compagnie de ces soldats désemparés dans un monde qui les dépasse. Malgré leur équipement moderne et les technologies de pointe à leur service, il est passionnant de les voir se débattre face à un monde dont ils pressentent qu’il repose sur des forces profondes infiniment plus puissantes qu’un drone ou un missile dernier cri.
Il faut également lire Un escalier de sable pour se rappeler que les plus grands drames naissent souvent de blessures d’enfant que ni le temps ni l’espace ne peuvent guérir.
Une illustration
L'auteur
- On dit de Djillali Defali qu’il est sans doute un des dessinateurs les plus doués de sa génération. Autodidacte, il se forme sur le tas en s’inspirant de Vatine, Rosinski, et de quelques grands auteurs de comics américains. Sa rencontre avec Caza s’avérera décisive et l’amènera à publier un premier album aux éditions du Cycliste en 1997, avant de créer avec Éric Corbeyran la série qui le lance véritablement : Garous, éd. Soleil, 1999-2994. Avec le même Corbeyran, il signe les série Asphodele, éd. Delcourt, 2003-2005, et Assasin’s Creed, éd. Grand Angle, 2009-2014. On lui doit également, liste non exhaustive, Leçons coloniales, éd. Delcourt, 2012 ; Uchronie(s) – New-York, 2008-2010 et Uchronie(s) – New Dehli, 2013-2014, éd. Glénat.
- Benjamin Legrand démarre sa carrière au cinéma en tant qu’assistant de réalisateurs tels qu’Édouard Molinaro, Christopher Miles, Jacques Demy et Jacques Rivette. Il est ensuite écrivain, traducteur, réalisateur pour la télévision et scénariste, notamment de bandes dessinées, dont : Tueurs de Cafards, en collaboration avec Jacques Tardi, éd. Casterman, 1984 ; Transperceneige en collaboration avec Jean-Marc Rochette, éd. Casterman, 1999-2000 ; La Religion, avec Luc Jacamon au dessin, éd. Casterman, 2016-2018
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