
La cuisine des ogres
80 p.
20 €
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Thème
L’héroïne de cette histoire, Blanchette, doit ce premier surnom à la blancheur de sa chevelure, subitement apparue à la suite de la mort de sa mère. Portant un lourd secret familial, la fillette décide de s’enfuir de sa maison et rejoint une bande de jeunes vagabonds qui ne la traitent pas beaucoup mieux. Toute la bande est enlevée par Grince-matin, un Croque-Mitaine, qui va les vendre au célèbre chef cuisinier et Ogre de son état, le sinistre Beauregret.
Ce chef, très doué par ailleurs, n’en est pas moins d’une impitoyable cruauté avec les ingrédients de sa cuisine dont les enfants font partie. Ainsi, à son arrivée dans la cuisine, la bande des vagabonds est-elle partagée en deux, une partie étant mise en cage pour être engraissée, l’autre, dont Blanchette, étant directement envoyée au hachoir à viande.
Blanchette sera la seule à survivre à la terrible machine, y gagnant au passage un nouveau surnom, celui de Trois-Fois-Morte, tant sa survie tient du miracle. Elle va alors s’employer à tenter de sauver ses compagnons d’infortunes réservés à l’engraissement.
Points forts
Vehlmann, le scénariste de cette histoire, a dû se souvenir des contes de sa jeunesse, comme par exemple Le Petit Chaperon Rouge, où la fantaisie et l’horreur se mêlent habilement pour tenir le jeune lecteur en haleine. Ainsi, son récit nous propose une galerie de créatures repoussantes, de monstres horribles, qu’il oppose à la candeur de la petite fille.
Bien sûr, à l’image des petites héroïnes de contes de fées, Trois-Fois-Morte sera bien plus forte et bien plus maligne que tous les monstres auxquels elle est confrontée. Mais, comme le récit est palpitant et mené de main de maître, je ne vais pas vous en dire plus, pour vous laisser le plaisir de la découverte.
D’autant plus que le challenge graphique est magnifiquement relevé par Andreae. Ce n’est pas une surprise, car ce dessinateur avait déjà donné une belle idée de son immense talent avec la série Azimut, réalisée avec son compère, le très prolifique Wilfrid Lupano (5 albums parus chez Vent d’Ouest). Je vous recommande en particulier ses décors et son art du découpage qui donnent un charme irrésistible et un rythme haletant à cette histoire qui devrait vous tenir en haleine jusqu’à la dernière case.
Quelques réserves
Il s’agit plus en fait d’une « précaution d’emploi ». Cette BD a fait partie de la sélection officielle « Jeunesse » du dernier Festival de la Bande Dessinée d’Angoulême, et semble donc destinée à un jeune public. Mais, avant de la mettre dans les mains de vos bambins, je vous conseille de prendre le temps de la lire.
En effet, outre le fait que vous devriez passer un bon moment, vous serez mieux à même de juger si ce récit risque ou pas de les impressionner. Personnellement, je situe l’âge pour apprécier cette BD à partir de 8 ans, … et jusqu’à 88 ans pour parodier un célèbre slogan.
Encore un mot...
CONTE DE FEES … POUR GRANDS ENFANTS
Cette Cuisine des Ogres est une des pépites de ce début d’année. Elle déborde largement de son cadre « jeunesse » pour séduire n’importe quel amateur de Bande Dessinée. La qualité du scénario, qui entretient un suspens permanent et offre des personnages auxquels on s’attache, et le charme du dessin, qui nous plonge dans un monde d’Heroic-Fantasy très réussi, sont deux ingrédients d’un succès prometteur. Je dis « prometteur », car même si ce récit se lit comme une histoire complète, la fin nous promet malgré tout une possible suite. Je vote pour !
Une illustration

L'auteur
Après des études aux Beaux Arts de Bordeaux, Jean Baptiste Andreae débute une carrière dans la publicité puis dans l'infographie. Il découvre la bande dessinée en 1991 suite à sa rencontre avec Mathieu Gallié. Après Mangecœur, leur première série primée à Angoulême en 1993, à Sierre en 1994 et à Angoulême en 1995, ces deux auteurs talentueux ont créé une seconde série, Wendigo encore chez Vents d'Ouest : une plongée dans les légendes du Grand Nord. Il se lance ensuite tout seul avec la série Terre Mécanique (Casterman) avant de dessiner La Confrérie du Crabe sur scénario du même Mathieu Gallié pour Delcourt. Puis en 2012, avec Wilfrid Lupano à la plume, il dessine le premier tome d'Azimut chez Vents d'Ouest.
En 1996, Fabien Vehlmann participe à un concours de scénario dans Spirou magazine, mais est éliminé du tirage car il ne respecte pas le format de rigueur. Malgré tout, il envoie durant toute une année des scénarios au magazine avant d'être finalement accepté. En 1998, il débute la série Green Manor, composée d'histoires courtes mises en images par Denis Bodart. Après ces premiers essais, il passe chez Dargaud, où il conçoit, dans la collection Poisson Pilote, les trois tomes de Samedi & Dimanche (2001-2005), un conte philosophique dessiné par Gwen. Mais c'est chez Dupuis qu'il connait son plus gros succès commercial en créant en 2005 la série fantastique jeunesse Seuls, pour laquelle il retrouve le dessinateur Bruno Gazzotti. La série remporte notamment le Prix Jeunesse du festival d'Angoulême 2007. L'éditeur lui confie la conception du premier tome de la nouvelle série Une aventure de Spirou et Fantasio par…, avec Yoann au graphisme. Ensemble, ils publient en 2006 Les Géants pétrifiés. Puis en 2009, Vehlmann et Yoann sont finalement choisis comme l'équipe officielle de la série officielle Spirou et Fantasio. Le tome 51, Alerte aux Zorkons sort en septembre 2010. Il est distingué en décembre 2019 du Prix René-Goscinny 2020 du meilleur scénario avec Gwen de Bonneval, pour le 1er tome du Dernier Atlas, une « uchronie au suspense intenable » selon Le Monde. En 2020 paraît le volume 2 du Dernier Atlas et l'album figure dans la sélection pour le Festival d'Angoulême 2021.
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