Le sang des cerises, Les passagers du vent T.8, 1/4
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La publication de l’album est prévue pour novembre 2018, mais les éditions Delcourt en proposent une prépublication trimestrielle en 4 parties, sous forme de journaux grand formats et en noir et blanc.
Voici donc le retour de la mythique série des "Passagers du Vent", avec ce tome 8, qui inaugure un nouveau cycle se situant dans l’univers historique de la Commune de Paris.
Mais avant de l’évoquer, il faut resituer cette saga dans son histoire. Les premières aventures des "Passagers du Vent" paraissent à la fin des années 70 aux Editions Glénat. Cette maison d’édition sera un véritable phénomène des années 80, en permettant l’éclosion de nouveaux auteurs talentueux. Bourgeon en est sûrement le plus emblématique. "Les Passagers du Vent", en suivant le destin de son héroïne Isabeau, nous entraîne au XVIIIème siècle, dans les méandres du commerce triangulaire, entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques. Le graphisme est sublime, le scénario palpitant et la documentation historique d’une précision sans faille. Les 5 premiers tomes de cette aventure, parus entre 1979 et 1984, constituent un des chefs-d’œuvre de la Bande Dessinée moderne.
30 ans après la parution du premier album, en 2009, Bourgeon propose une première suite à son histoire, en deux volumes, « La petite fille Bois-Caïman », qui déconcerte ses fans, dont votre chroniqueur : j’avais quitté Isabeau, héroïne exaltée de 18 ans en 1782, en rêvant qu’elle retourne en France vivre la Révolution. Au lieu de cela, on la retrouve centenaire en Louisiane en pleine guerre de sécession, passant le flambeau à une autre Isabeau, surnommée Zabo.
20 années passent et nous retrouvons Zabo, qui a changé de prénom et s’appelle maintenant Clara, dans le Paris d’après la Commune. L’histoire débute précisément le jour de l’enterrement de Jules Valles, figure emblématique de cette période, par la rencontre de Zabo/Clara et d’une jeune bonne débarquant de sa Bretagne natale.
Points forts
- L’originalité, en premier, avec cette pré-publication de la BD en 4 numéros trimestriels, sous forme d’un journal. Les 21 premières pages de l’histoire sont proposées en grand format noir et blanc qui nous permet de nous délecter du trait de Bourgeon.
- A plus de 75 ans, l’auteur n’a rien perdu de sa précision et de sa vivacité. L’histoire est tout de suite prenante, sans les effets de style qui avaient un peu plombé les deux albums précédents. Bourgeon retrouve le souffle épique du début des Passagers; on rentre dans l’histoire et on n’a plus envie d’en sortir.
Quelques réserves
Il faut accepter d’en sortir, justement, après ces 21 pages et attendre un trimestre le deuxième journal, et ainsi de suite jusqu’à la parution, dans un an, de l’album, où on pourra en plus découvrir sa mise en couleur.
Encore un mot...
Alors que la première suite des passagers s’était empêtrée entre sa volonté de terminer une histoire et celle d’en créer, sans trop de succès, une nouvelle, voici qu’on retrouve le souffle épique et la force historique de la grande aventure façon Bourgeon. Nous n’avons, pour l’instant que 21 pages sous les yeux, mais le chef-d’œuvre pointe déjà le bout de son nez. Au-delà de la beauté graphique, c’est surtout la force de Clara, cette nouvelle héroïne, si peu convaincante dans le Bois-Caïman, qui, là, nous entraîne par sa fougue et ses convictions.
Une phrase
De l’interview de F Bourgeon, figurant en première page intérieure de ce journal, à propos du titre de cette nouvelle saga:
« Deux chansons de Jean-Baptiste Clément : « le Temps des cerises » et « la Semaine sanglante », résumeraient à elles seules l’histoire de la Commune. Si la seconde est moins connue, la première s’est profondément ancrée dans la mémoire populaire. D’une façon ou d’une autre, directement ou par ses proches, chacun de mes principaux personnages a sa vie bouleversée entre ses deux chansons. »
L'auteur
François Bourgeon est une des figures les plus atypiques du paysage de la Bande Dessinée francophone. Alors que sa série « les Passagers du Vent » lui ouvrait une voie royale d’auteur à succès, il va bien au contraire choisir une carrière marginale, assez peu prolifique en œuvres et toujours portée par des exigences complexes. On peut résumer sa bibliographie, post- « Passagers du Vent », à deux séries : « les Compagnons de crépuscule », histoire ésotérique moyen-âgeuse et « le cycle de Cyann », en collaboration avec Lacroix, qui se situe dans un univers fantastique créé de toutes pièces. L’une comme l’autre, bien que très différentes, ont en commun une complexité de lecture assez déroutante, même si, toutes les deux, sont de grande qualité et absolument recommandables.
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