Hector le Boucher

Un boucher vraiment pas comme les autres. Délicieusement invraisemblable
De
Scénario : Djian & KolonelChabert, dessin : KolonelChabert
Ed. Jungle 124 pages 16,95 €
Recommandation

 Plus sympa, plus écolo qu'Hector, le jeune boucher créé par Djan et KolonelChabert, tu meurs. Profitez-en, d'autant plus que son parcours est complètement déjanté.

Notre recommandation
4/5

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Thème

Hector le Boucher est une BD très difficile à résumer, car, à chaque fois qu’on semble en tenir le fil narratif, les auteurs s’ingénient à brouiller les pistes. Et cela n’arrête jamais. Imaginez : L’histoire commence sur un mode drame social, avec le petit Hector, fils de boucher, qui perd subitement ses deux parents, et qui est alors élevé par ses grands-parents, dont un grand-père horrible en mode « Thénardier ». Après un petit intermède heureux avec sa tante Betty, Hector replonge dans l’horreur sociale, en étant obligé de travailler dans un abattoir (où on comprend par une discrète allusion qu’on est proche de l’enfer). Cette période est une plongée dans les abysses du désespoir, et tout semble perdu pour Hector, lorsque, presque d’une case à l’autre, tout change et il se retrouve à travailler chez un boucher écologiste. Hector apprend alors toutes les vertus de l’élevage extensif, et de la production de viande de qualité, vertus qu’il appliquera à sa propre boucherie, quand il sera enfin en mesure de l’avoir. Mais, alors qu’il devient un combattant acharné en lutte contre l’ultra-libéralisme, l’histoire nous réserve encore deux revirements complètement inattendus, mais je ne vais tout de même pas tout vous dévoiler...

Points forts

Que c’est bon d’être surpris. Voici une BD sur laquelle il est impossible de mettre le moindre qualificatif, car à chaque fois qu’il vous semble en tenir un, vous tournez une page, et hop, l’histoire devient autre chose. Vous partez en mode « pauvre orphelin », vous passez par la case « éducation érotique », vous enchaîner en mode « violence gratuite », puis vous virez subitement sur de l’écologie, et ça n’arrête pas, pour le plus grand bonheur du lecteur.

La galerie de personnages qui découle de ce foisonnement est aussi un joli point fort de l’histoire. Impossible d’en isoler quelques-uns, tant ils sont tous savoureux, que ce soit pour le meilleur (ah tante Betty!) ou pour le pire du destin d’Hector.

Le graphisme de Chabert me rappelle celui de Baru (pour ceux qui ne connaissent pas, je recommande de le découvrir avec « la Piscine de Micheville » chez Dargaud) : un trait très expressif et très nerveux qui donne beaucoup de rythme à cette BD

Quelques réserves

En contrepoint de l’originalité du scénario évoquée ci-dessus, on peut être déstabilisé par les virages incessants de l’histoire. Cela pourrait nuire à la crédibilité de l’ensemble. De plus, comme Chabert affiche une volonté militante, cet aspect est nettement affaibli par la construction scénaristique, le message politique se diluant dans les rebondissements incessants. Mais on sent tellement que les deux auteurs ont cultivé le goût de l’invraisemblable en écrivant cette histoire qu’il est difficile de retenir cela comme un point faible.

Encore un mot...

En plein dans les débats actuels sur l’avenir de la planète, voici une façon originale de nourrir la discussion. Cette BD parvient à être une critique forte de notre système ultra-libéral destructeur de nos ressources, sans jamais être pontifiante ou ennuyante. Rien que pour cela, elle mérite un peu plus de notoriété et d’exposition.

On se plaît à retrouver dans les états d’âme d’Hector nos propres interrogations sur le monde et son évolution. Continuer à manger de la viande ou être végétarien (ce n’est pas le moindre paradoxe de cette BD que de promouvoir le modèle végétarien en s’appelant « Hector le Boucher »), prendre le temps de s’interroger sur la qualité de ce qu’on achète, se sentir esclave d’un productivisme à outrance, etc.

Et tout ça en étant une BD de qualité, attachante et originale.

Une illustration

L'auteur

LES AUTEURS (d’après BDGest)

Alexis Chabert est né le 1er mai 1962 à Paris. Les dessins de son père baignent son enfance et favorisent son goût pour l’illustration. Après avoir obtenu son baccalauréat, il étudie quelques mois aux Beaux-Arts de Versailles. Peu satisfait des cours qu’il y suit, il bifurque vers le Conservatoire de musique (guitare classique) avec la ferme intention de devenir professionnel. Il se rend malheureusement compte qu’il lui faudra de longues années avant que cela ne devienne lucratif. Il revient donc à l’illustration mais apprécie toujours autant les musiques de films, les chants liturgiques ainsi que les musiques traditionnelles. Pendant 6 ans, il fait partie d’un studio de création graphique tout en essayant de monter un projet BD avec son vieil ami Eric Suchère. Après de nombreuses tentatives infructueuses, il finit par montrer son travail à Guy Delcourt et ce dernier le présente à Didier Convard. Ils s’attaquent ensemble à la série médiévale Rogon le Leu, époque qu’Alexis appréciait déjà pour sa musique.

Jean-Blaise Djian, scénariste d'origine arménienne, vit en Normandie. Dans les années 80, il se lie d'amitié avec Loisel qui lui apprend les codes de la bande dessinée. C'est un scénariste aux multiples facettes (western, fantasy, science-fiction, policier…), il est l'auteur de plusieurs albums chez Vents d’Ouest (Tard dans la nuit) et Soleil (Fleurs Carnivores). Aussi à l'aise dans l'écriture de récits de l'imaginaire (science-fiction et fantasy) que dans ceux ancrés dans la réalité (polar, western), Jean-Blaise Djian a écrit quatre séries pour la collection Trilogies (Galathéa, La Tombelle, Adèle et Caïn, Chito Grant) et trois bandes dessinées dans la collection Petits Meurtres (L’Échiquier de Madison, Parabellum et Le Mystérieux Docteur Tourmente). Mais son projet le plus ambitieux est France-Arménie, l'histoire vraie d'un boxeur parti chercher la gloire en URSS...

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