
Havana Split 1. Bienvenue à Cuba
88 p.
17,50 €
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Thème
Ça secouait pas mal à Cuba en avril 1958. On pouvait y croiser un dictateur en bout de course prêt à brader son île contre la promesse de conserver le pouvoir ; des équipes de la CIA dénuées de tout scrupule pour préserver leurs intérêts dans ce qui était encore « l’arrière-cour » des Etats-Unis ; des mafieux réalisant que leurs affaires étaient réellement menacées par Castro et ses guérilleros ; un directeur d’agence de détectives privés accro au jeu en passe d’être ruiné ; un ex-membre de la CIA en rupture de ban cherchant à surnager dans le chaos ambiant ; une secrétaire revêche et fidèle…
C’est ce moment que choisit Lily, fille dudit directeur d’agence, pour revenir voir son père après plusieurs années passées à Miami. Au même moment, Don Alfonso, figure de la pègre locale, décide de lancer une opération visant à éliminer son principal rival, Ernesto Ochoa, dit « L’Ambassadeur ». Sa stratégie ? Le prendre par les sentiments. Sa tactique ? Enlever sa maîtresse. Son modus operandi ? Sous-traiter l’opération en réquisitionnant de force l‘agence de détectives privés.
Tout cela sur fond de matchs de base-ball, de rumba, de cocktails, de plages, de jungle, de bombes artisanales et de mitraillades…
Points forts
Havana Split est très drôle. Bourré d’humour noir, de second degré et d’auto-dérision. Il possède également une façon unique de forcer le trait des personnages et des situations au-delà de la caricature, pouvant les rendre parfaitement loufoques. Comme si les auteurs avaient voulu « dénoircir » et rendre plus supportables les sujets qu’ils abordent. Ce parti pris nous offre ainsi des dialogues savoureux, des rebondissement improbables, une violence en mode « jeu vidéo », une pléthore de personnages tous plus attachants les uns que les autres du fait même de leur « outrance » et de leur caractère archétypique.
Le graphisme n’est pas en reste. Influencé par un cocktail détonnant de cartoons US, de jeux vidéo, d’affiches publicitaires des années 1930, il irrigue tout l’album d’un dynamisme qui ne faiblit jamais. Celui-ci est soutenu et amplifié par un sens du cadrage qui, utilisant toutes les techniques du cinéma, crée un rythme endiablé, interdit tout temps mort, et force le regard à être en permanence en mouvement comme dans un True Romance, Tony Scott, 1993 ou un Il faut flinguer Ramirez, de Nicolas Petrimaux, éd. Glénat, 2018-2020.
Quelques réserves
Ça passe trop vite. Attention, le rythme est tellement soutenu qu’on risque de se faire happer et de « survoler » l’album. Mon conseil ? Se hâter lentement pour déguster comme il se doit Havana Split. Ou s’autoriser rapidement une deuxième dégustation.
Encore un mot...
Lire Havana Split, c’est un prendre un passeport pour Cuba. C’est une invitation à découvrir l’histoire riche et complexe de la plus grande île des Antilles, à admirer un coucher de soleil sur le Malecon, à faire un tour cheveux au vent dans une belle américaine des années 50, à déguster un Papa Doble ou un Frozen Daiquiri, à découvrir les cigares artisanaux vendus au coin d’un champ, à visiter la Finca Vigia où Hemingway écrivit The Old Man and The Sea…
C’est prendre le risque de (re)plonger dans l’abondante bibliographie et filmographie construite sur les « mythes » cubains : le paradis du jeu, la mafia, la révolution castriste, les relations troubles avec l’Amérique de Kennedy… Je ne peux m’empêcher de partager quelques ouvrages qui me sont chers : American Tabloid, James Ellroy, 1995 ; El Commandante Yankee, Jakupi, éd. Aire Libre, 2019 ; The Godfather Part II, 1974, Francis Ford Coppola ; JKF, 1991, Oliver Stone ; Miami Vice, Michael Mann, 2006. Et l’on notera que le tome 2 du sublime Tyler Cross, Angola, commence dans le même pénitencier de Louisiane où Jim Garrison rencontre son premier témoin important dans le magistral JFK cité plus haut…
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L'auteur
Connu également sous les appellations : Frédéric Brémaud, Brr, Frédéric Alléluïa Brémaud.
De son vrai nom Frédéric Brémaud, dit Brrémaud, est également connu sous les noms de Brr, Frédéric Alléluïa Brémaud ou Lili Mésange. Il est bien difficile de résumer la carrière de ce scénariste aussi prolifique qu’éclectique. Mettons néanmoins un coup de projecteur sur quelques-unes de ses œuvres ayant précédé Havana Split : Sexy Gun, avec Mathieu Reynès, éd. Soleil Productions, 2003-2004 ; Les Informaticiens, avec Mathieu Reynès et Jean-Marc Krings, éd. Bamboo Editions, 2006-2009 ; Vietnam, en collaboration avec Chico Pacheco, éd. Glénat, 2012-2015 ; Klaus Barbie – La route du rat, éd. Urban Comics, 2022 ; Kernok le Pirate, avec Alessandro Corbettini, éd. Glénat, 2024.
Née à Rome en 1991, Vittoria Macioci fait ses études en France où elle obtient en 2016 le diplôme de l’école Émile Cohl (Lyon) section illustration, Bande Dessinée et animation. Dès 2020, elle commence sa carrière d’illustratrice de BD avec Gravity Level, éd. Sarbacane. En 2023, elle contribue au projet Nées Rebelles, éd. Deman éditions.
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