La Chambre d’à côté

Pour son premier long-métrage américain, Pedro Almodovar s’offre un film sur le droit à mourir dans la dignité et décroche le Lion d’Or à la dernière Mostra de Venise…
De
Pedro Almodovar
Avec
Tilda Swinton, Julianne Moore, John Turturro…
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Thème

Amies de longue date - elles ont débuté leur carrière au sein du même magazine - mais s’étant perdues de vue depuis plusieurs années, Ingrid, romancière à succès (Julianne Moore) et Martha, reporter de guerre (Tilda Swinton) se retrouvent lors d’une séance de dédicaces à New York. A cette occasion, Martha apprend à Ingrid qu’elle est en phase terminale d’un cancer et, dans la foulée de cette nouvelle, lui demande d’être présente non loin d’elle (dans « la chambre d’à côté ») lorsqu’elle décidera d’en finir. D’ici là, les deux amies vont s’appliquer à faire le bilan de leur existence et à vivre le mieux possible dans le confort chic d’une maison isolée, en évoquant les problèmes sociétaux d’aujourd’hui… 

Points forts

  • Le sujet : Le droit des humains à mourir dans la dignité. Est-ce parce qu’il vient d’avoir 75 ans ? Depuis quelque temps (Julieta), Pedro Almodovar qui fut l’un des enfants terribles de la movida s’assagit et tourne des films centrés sur des thèmes plus sombres tels que l’introspection, la filiation ou, comme ici, l’euthanasie. Mais il le fait à sa manière, forte et engagée, en s’autorisant des échappées vers des thèmes qui lui sont chers depuis toujours, comme la liberté, le désir et l’homosexualité, ce qui enrichit ses films et les rend si intéressants. 

  • Le style : Si ses scénarios deviennent plus austères et plus mélancoliques, ses dialogues restent d’une intelligence et d’une subtilité vives. Quant à ses décors, ils en mettent toujours plein les yeux. De ces points de vue là, « scénaristique » et esthétique, Almodovar ne change pas. Il reste…l’ Almodovar de Talons aiguilles et autres chefs-d'œuvre.

  • Le casting : La Chambre d’à côté étant adapté du roman Quel est donc ton tourment? de l'Américaine Sigrid Nunez, Almodovar a voulu respecter la langue de ses personnages et aussi le pays où son intrigue se déroule. Et pour marquer le coup de cette grande première pour lui, il a fait appel à deux comédiennes parmi les plus cotées du monde : Julianne Moore et Tilda Swinton. Évidemment le duo de ces deux super stars fonctionne à merveille. Dommage que leur réalisateur les ait dirigées vers trop de sobriété (voir ci-dessous)

Quelques réserves

Outre que La Chambre d’à côté est trop bavard (certaines scènes ont tout d’une séance de psychanalyse !), on regrette qu’il manque d’émotion. La faute à un jeu trop retenu, trop distancié de ses comédiennes principales, notamment à celui de Tilda Swinton. 

Encore un mot...

Depuis ses débuts, voici 45 ans, Pedro Almodovar, le réalisateur espagnol préféré des Français, n’a eu de cesse de mettre les femmes à l’honneur et de leur demander d’être son porte-parole. Une fois encore il ne fait pas exception avec ce nouveau film qui plaide pour le droit des humains à mourir dans la dignité. Sans être tout à fait réussi (on ne devrait pas rester de marbre face à une telle histoire !), La Chambre d’à côté mérite d’être vu pour les réflexions qu’il suscite, pour ses actrices aussi, qui même dirigées avec trop de pudeur, restent, quand même, de sublimes interprètes.

Une phrase

« Dans mes films, on parle beaucoup. Les mots ont une importance aussi essentielle qu’au théâtre. De tous les éléments narratifs (tous essentiels, et pour chacun desquels je m’implique sans réserve), les acteurs, les actrices sont ceux qui racontent réellement l’histoire. Dans La chambre d’à côté, le poids du film repose entièrement sur les épaules de Tilda Swinton et de Julianne Moore. Le spectacle, c’est elles. » (Pedro Almodovar, cinéaste - Extrait du dossier de presse). 

L'auteur

Né en Espagne en 1949 d’un père viticulteur et d’une mère liseuse et traductrice pour analphabètes, Pedro Almodovar est envoyé à huit ans dans un internat catholique, dans l’espoir qu’il devienne prêtre. Mais le jeune homme découvre le cinéma et particulièrement Luis Bunuel, dont il se revendiquera : «  Le cinéma est devenu ma véritable éducation, bien plus que celle que je recevais du prêtre », déclarera-t-il. Et en 1967, à 18 ans, il part à Madrid contre la volonté de ses parents, avec l’intention de devenir réalisateur. Pendant douze ans, il va vivoter de petits boulots entre lesquels il poursuivra ses rêves de cinéaste, et  collaborera avec une compagnie théâtrale où il rencontrera Carmen Maura. 

Petit à petit, il devient un personnage important de la Movida, et écrit des articles et des nouvelles. A 22 ans, il achète une caméra et tourne des courts-métrages. En 1978, il réalise son premier long métrage amateur en super 8, Folle… folle…fólleme Tim ! En 1980, il devient professionnel avec Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier. Deux ans après, c’est Le labyrinthe des passions, qui marque le début de sa collaboration avec Antonio Banderas. Il est lancé et devient l’enfant le plus turbulent  du cinéma espagnol. Il n’arrêtera plus et fera plus de vingt films, dont des petits chefs-d'œuvre, comme Attache moi ! (1990), Talons aiguilles (1991), Tout sur ma mère (1999) ou encore Volver (2006). Reparti de Venise à la fin de l’été dernier avec Le Lion d’Or (assez discutablement) La chambre d’à côté est son vingt-quatrième long métrage.

Commentaires

Jan
mer 22/01/2025 - 13:21

Film lisse, très américain, malheureusement...Il est certes esthétique au détriment de l'expression des sentiments... Un Almodovar : non.
Il n'y a pas la " consistance" de la langue Espagnole, et une mise en scène subtile, des émotions qui vous prennent au cœur, et au corps. Un sujet fort, traité, à mon sens, sans ÂME...

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