Falco
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Thème
Laurenzo Falco aime naviguer en eaux troubles. Baroudeur, agent secret, exécuteur de basses œuvres et séducteur irrésistible, il est chargé par les services secrets franquistes de libérer le fondateur des Phalanges, emprisonné par les "rouges", en zone républicaine. Nous sommes au cœur de l'Espagne déchirée par sa guerre civile, slalomant entre vrais et faux partisans, infiltrés en territoire républicain, pour la réalisation d'un audacieux plan d'évasion. Falco va rencontrer des figures exaltées et troubles, agir et subir, obéir et peut être… trahir. San Dieu ni maitre, Falco va être le point focal d'un épisode de l'affrontement des phalangistes et des républicains, entre Salamanque et Alicante.
Points forts
1- Il est toujours agréable de saluer la naissance d'un nouveau héros sous la plume d'un grand romancier. Falco semble une version "moderne" du capitaine Alaltriste inventé par Arturo Perez-Reverde en 1990, et qui avait pour scène l'Espagne du XVIIème siècle.
2- La période de la guerre civile d'Espagne (1936- 1939) est traitée du coté "sombre" dirait-on aujourd'hui, c'est-à-dire du coté des phalanges, qui ouvriront les portes du pouvoir au Général Franco. Mais qu'on se rassure, ce camp là, pas plus que celui des républicains, n'est traité avec la moindre complaisance. Et c'est sans doute une qualité que de révéler la brutalité des répressions idéologiques perpétuées par les deux camps.
3- Un intrigue qui ménage bien ses rebondissements… impossible d'en dire plus sans gâcher la progression dans le récit.
Quelques réserves
1- Ce roman est bien convenu : Falco est caricatural dans sa froideur et sa séduction de mâle dominant ; le démarrage est lent et poussif, bien qu'intéressant pour découvrir la vie des deux côtés de l'Espagne déchirée par la guerre civile, et singulièrement, celle des services secrets.
2- Certaines scènes sont d'un stéréotype assez surprenant - pour ne pas dire consternant - de la part de l'auteur duTableau du Maitre Flamand, de Club Dumas et quelques autres Cimetière des bateaux sans nom…
3- C'est anecdotique mais la traduction nous fait découvrir quelques mots plus improbables que savants, rarement croisés dans d'autres romans, de plume espagnole ou trempés dans d'autres encres.
4- Et une couverture énigmatiquement caricaturale, sauf à être destinée aux présentoirs de gares !
Encore un mot...
C'est triste à dire mais Falco n'arrive ni à l'épaule de L'ange noir ou du commissaire San Antonio (Frédéric Dard), dont la violence, l'insolence et les exploits (sexuels ?) ont "charmé" une génération (ou deux ?) de lecteurs (masculins ?), ni aux cheville du commissaire Bernie Gunther, déchu et désabusé, né de la plume du regretté Philippe Kerr, décédé en mars 2018. Car voilà, si vous cumulez la lecture de leurs aventures avec une errance coupable dans les rues de Barcelone aux cotés de Daniel Semperé dans Le Labyrinthe des esprits (Carlos Luiz Zafon), le roman d'Arturo Perez-Reverde est bien pâle, s'il serait injuste de le dire ennuyeux. Il campe quand même des personnages à la hauteur des idéaux et de la violence de l'époque, et des antagonismes qui ne sont sans doute pas loin de vérités historiques.
Espérons que les ailes de Falco, pour de nouvelles aventures, prendront de la vigueur et des couleurs plus subtiles sous la plume de son géniteur.
Une phrase
Ou plutôt deux:
- "Par ces temps de guerre, de révolution et j'en passe, mieux vaut l'amour libre, non ? Vivons, et aimons, nous qui mourrons demain.
Il remarqua qu'Eva Rengel était maintenant légèrement tendue.
- Ca suffit. Tu plaisantes souvent avec ça ?
- L'amour ?
- Le fait d'être tué. Les lèvres de Falco se tordirent en un sourire cruel.
- Seulement quand je risque de l'être.
Sur ces mots, il promena un vif regard sur la gabardine, qui nouée à la taille, moulait les formes de la jeune femme". p 116
- "Subitement tendu, il lui serra le bras.
-Tais toi.
Ce fut son instinct qui l'alerta avant ses sens. Habitué à flairer le danger comme un bon chien de chasse, il s'avisa que quelque chose clochait. Il y eu d'abord une ombre furtive qui se déplaçait sur sa gauche, puis un bruit de pas trop rapides derrière lui. Deux présences, tout à coup, et une autre ombre se profilait devant eux, au coin de la rue, pour leur barrer la route". P 192
L'auteur
Né en 1951, Arturo Pérez-Reverte a été reporter et correspondant de guerre de 1973 à 1994. Membre de l’Académie royale espagnole depuis 2003, il a obtenu le Grand prix de littérature policière en 1993 avec Le Tableau du maître flamand. La série des Aventures du capitaine Alatriste paraît en sept volumes de 1998 à 2012, romans historiques de cape et d’épée, portés au cinéma en 2005. On peut citer encore Le Maître d’escrime (1994), Le Hussard(2005), Cadix, ou la Diagonale du fou (2007) et Un jour de colère (2008) et plus récemment, Deux hommes de bien (2017). Falco a été publié en édition originale espagnole en 2016. Synthèse actualisée et exportée de la chronique de Marie de Benoist, sur ce dernier roman.
Commentaires
Bonjour,
Je rejoins complètement votre critique. Et j'y ajoute que l'écriture est d'une navrante platitude avec un sérieux problème de répétition des mots "regard" et "yeux" ainsi que des verbes "regarder" et "observer". Ils reviennent systématiquement et souvent plusieurs fois sur une seule page.
Reprenons justement la p116 que vous citez :
- Les regards de Falcó et d'Eva se croisèrent
- Elle soutint son regard une seconde de trop
- Sur ces mots, il promena un vif regard sur la gabardine
C'est insupportable !
Je suis en train de le lire en Espagnol. Je me demandais si c'était mon niveau d'Espagnol qui était insuffisant pour bien comprendre ce récit, car franchement, je trouve ce livre presque caricatural dans ses descriptions, ses situations...
Mais non, quand je lis les critiques, je suis rassuré sur mon niveau de compréhension de cette belle langue.
Je craignais d'être "passé à côté" d'un second degré...
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