Une pluie d' oiseaux

Les oiseaux nous relient au vivant ; sans eux, plus de vie ! Un cri d’alarme poétique pour leur prêter encore plus d’attention…
De
Marielle Macé
éd. Biophilia
Mai 2022
378 p.ages
23 €
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Thème

 Dans nos imaginaires, la figure de l'oiseau tient une place singulière. Depuis toujours, chez les troubadours et les poètes, le chant de l'oiseau se confond avec nos messages d' amour, dans une épure quasi parfaite. Jadis les hommes scrutaient l' horizon, guettaient l'envol de l' aigle royal ou le passage des hirondelles, tentaient d' interpréter leurs arabesques dans le ciel. 

 Aristophane proclamait " la cité des oiseaux”, Michelet forgeait un concept nouveau : les oiseaux -le peuple- , sorte de plaidoyer en faveur des petits et des humbles. 

 Mais voici que ce lien ancestral, qui nous reliait au vivant s' efface et nous découvrons soudain, avec l' effondrement des populations d'oiseaux, sa fragilité. En quinze ans, près d'un tiers des oiseaux ont disparu de nos paysages. Les causes sont multiples : destruction des habitats, artificialisation des sols, pesticides etc. Rachel Carson prophétisait déjà dans les années soixante " le printemps silencieux ". Pourtant dans les premiers mois du Covid, les citadins ont redecouvert  avec émotion,  à travers le cri du merle noir ou le pépiement des moineaux, la force de cet attachement. 

 Cette expérience sensorielle, remarque l'auteure, nous questionne sur notre propre capacité d'écoute et sur la signification de cette perte. Existe-t- il un langage commun entre espèces, une parole qui puisse conjurer la catastrophe écologique qui vient susciter une nouvelle rencontre avec la nature ?

 Que signifie cet attachement à l' heure où “il pleut des oiseaux " ?

Points forts

C'est un livre d' émerveillement et d'inquiétude.  Au-delà de sa très large érudition,  littéraire, historique, sociologique, ethnologique, Marielle Macé nous livre (en creux) un grand récit des origines. Elle écrit sur le fil du rasoir, entre courage et résignation, dans un style léger, poétique, aérien.  

 Son évocation des coutumes des " gueules noires'', ces mineurs du Pas de Calais, harassés  par leurs labeurs mais tendrement attachés à leurs colombes ou à leurs pigeons d' élevage, est bouleversante.

Quelques réserves

Très peu. Parfois, sur certaines pratiques, comme la chasse, on voit affleurer un zeste de discours de militant écolo , mais l'universitaire reste rigoureuse et précise. Son constat sur cette tradition ancestrale est accablant : extermination par les Européens du fameux dodo mauricien, ou disparition de centaines de milliers de pingouins dans les Falkland il y a deux siècles.

Encore un mot...

 Ce livre,  si l' on souhaitait à tout prix le classer, relèverait de l' éco-poésie avec au fil des pages, quelques perles de mots rares et précieux : pour dire le bonheur et le bruissement d'une flopée d étourneaux ou de chardonnerets, l'auteure évoque des murmurations. 

 Les oiseaux écrivent dans le ciel et cette langue perdue manque cruellement aux humains.

Une phrase

"Depuis que les oiseaux  s'éteignent, la signification de leur chant vrille : ils chantent et ne chantent plus, ils se taisent mais font valoir qu' ils se taisent. Il n' y a pas là qu'un silence, il y a au contraire beaucoup à entendre.  

 Qu' est-ce que ça nous fait alors, de voir s'éteindre ceux à qui on s'agrippe , de sentir pleuvoir ceux à qui et par qui tant de discours, d' histoires, d'aventures de sens, de captures, nous ont depuis si longtemps liés ? Ça nous fait pleuvoir avec eux sans doute ; ça nous dit que nous dépendons de ce qui tombe, que nous ne tenons parfois qu'à ce fil".

L'auteur

Gabrielle Macé est historienne, normalienne et agrégée. Directrice de recherche au CNRS, elle enseigne la littérature à l' EHESS.  Elle fait partie des animateurs de la revue Critique et  de la revue Poésie.

Commentaires

Vincent Spatari
jeu 26/01/2023 - 07:07

Une envie intense que le jour se lève et lire dans le ciel ce que dessinent les murmurations des étourneaux....Merci Pascal

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