lAURENE BOULITROP : Charlotte
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Thème
Charlotte, une jeune juive allemande, raconte son enfance berlinoise, marquée par la mort de sa mère, son exclusion du lycée à la suite des mesures antijuives prises par les nazis, son admission exceptionnelle à l'Ecole des Beaux-Arts et l'histoire d'amour intense et singulière qu'elle vit avec Albert.
Artiste, parce que l'art permet de se cacher et « abrite de la haine », Charlotte est cependant vaincue par les persécutions qui touchent les juifs. Répondant à l'insistance de son père, un médecin exclu de l'université et miraculeusement libéré de son emprisonnement, elle finit par fuir Berlin pour se réfugier chez ses grands-parents, dans le sud de la France. C'est là que la tragédie familiale lui est révélée.
Points forts
- Un texte en forme de complainte essoufflée, économe et vibrant. En choisissant de mettre l'accent sur les années berlinoises de l'enfant puis de la jeune fille, le moment où elle sait à peine qu'elle est artiste, plutôt que sur ses années françaises et le drame final, celui de son assassinat à Auschwitz en octobre 1943 (qui n'est pas même évoqué), le spectacle se concentre sur la naissance et la formation d'une artiste.
- Une mise en scène sobre jusqu'à l'épure qui joue tout entière sur des voilages agités par un souffle d'air et des jeux de lumière et de musique subtils.
Quelques réserves
- Le jeu très travaillé de Laurène Boulitrop, censé « donner un corps et une voix » à l'intériorité tourmentée et artiste d'un personnage et en communiquer l'intensité, peut ne pas convaincre. Le corps raide de la jeune femme, aux articulations verrouillées, ses mains inutiles, son buste tendu et tressautant, sa diction en forme de mélopée soulignent excessivement, en les artificialisant, les tourments du personnage. Au final, ce parti pris de comédienne-metteure en scène écrase le récit, neutralise l'émotion et le spectateur se prend à rêver d'une interprétation plus déliée, plus naturelle et au total plus légère.
Encore un mot...
Un seule en scène poignant et pudique et, mieux que cela, d'une intégrité esthétique et historique remarquable. En contant la jeunesse de l'artiste peintre juive allemande Charlotte Salomon, le spectacle mêle la tragédie historique aux drames familiaux et amoureux. Sans lourdeur et sans « discours », le texte montre comment se construit une personnalité artistique dans un rapport à soi d'autant plus tourmenté que le monde ne tourne pas rond. Certains jugeront la théâtralité de ce spectacle, qui peut fonctionner en dyptique avec Clouée au sol, un peu austère et forcée et s'y ennuieront parfois. D'autres apprécieront le choix de Laurène Boulitrop qui, renonçant à évoquer la maturité et la mort de son personnage a le mérite de renoncer ainsi à faire des phrases sur Auschwitz, mérite que n'a pas le roman.
Une phrase
Ou plutôt deux:
- "Ma précision, c'est la mémoire du cœur".
- "Le suicide est une mort qu'on ne donne pas à l'ennemi".
L'auteur
Principalement romancier et dramaturge, mais aussi scénariste et réalisateur, David Foenkinos est l'auteur de 15 romans traduits en plus de quarante langues. En 2014, Charlotte, récit évoquant le destin tragique de l'artiste Charlotte Salomon est le roman le plus vendu en France et obtient le prix Renaudot et le prix Goncourt des Lycéens.
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