Ripley
NETFLIX : 1 saison de 8 épisodes de 50’à76’
Sortie le 4 avril 2024
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Thème
Héros du livre de Patricia Highsmith, est-il nécessaire de rappeler l’histoire de Tom Ripley qui a par ailleurs déjà fait l’objet de 2 films, et pas des moindres : Plein soleil avec Alain Delon (1960) Le talentueux Mr Ripley avec Matt Damon (1999).
Néanmoins pour mettre sur la piste ceux qui n’auraient encore ni vu ces films ni lu le livre originel …, vous voilà en présence d’un américain de New York, plus médiocre que moyen mais intelligent et qui s’en sort, en vivotant grâce à de multiples combines plus ou moins réussies. Le voilà, un jour, approché par Monsieur Herbert Greenleaf, le père milliardaire de Richard. Herbert, convaincu que Tom Ripley est un ami assez proche de son fils (appelé aussi Dickie), lui propose d’aller convaincre ce fils vivant en Italie une vie de « fils à papa » (ce que Richard est) pour reprendre les rênes de l’entreprise familiale aux Etats Unis…
Pour une telle mission, bien sûr, Tom sera très grassement rémunéré !
Points forts
La mise en scène de la série est époustouflante, du premier au dernier épisode, avec un sens de l’esthétique aigu, pour moi, du jamais vu dans une série.
D’autant que le réalisateur a fait le choix du Noir et Blanc pour filmer un pays baigné de lumière et réputé pour ses couleurs et ses grands peintres.
En l’occurrence ici, on s’intéresse au peintre Le Caravage tellement lumineux en noir et blanc, qu’on en oublierait qu’il était par excellence le Maître de la couleur et de la lumière.
Le noir et blanc du début à la fin magnifie personnages, sculptures ou scènes de vie que ce soit à Rome, Venise, San Remo Naples ou Atrani…
Une jouissance pour les amoureux de la peinture et de la photographie. Qui plus est le temps donné à chaque scène, nimbée de cette ambiance apporte de la profondeur aux personnages et notamment à celui de Tom Ripley.
Nous voilà entraînés dans un excellent polar américain des années 60, et qui n’aurait pas pris une ride !
Enfin à noter le clin d’œil à la variété italienne des années 60 qui s’égrène par-ci par-là pour notre plus grand plaisir.
Quelques réserves
Pour les amoureux de l’action ou pour les non aficionados de la photographie en noir et blanc, mieux vaut s’abstenir.
Dans le dernier épisode de la série, la scène où réapparaissent les morts assis face à Tom Ripley (son Inconscient ?) n’est pas vraiment judicieuse ; seul petit défaut, à mon goût, car procédé trop communément utilisé de nos jours et sans utilité.
Encore un mot...
Le personnage de Tom Ripley, escroc par opportunisme créé par l’auteure anglaise Patricia Highsmith en 1955 a été à plusieurs reprises adapté cinématographiquement. Et pourtant à chaque fois c’est une découverte, car personnages et environnement diffèrent.
Dans Plein Soleil de René Clément, le duel entre les 2 figures principales, interprétées par Alain Delon /Tom, (film qui d’ailleurs le révèlera) et Maurice Ronet /Philippe se joue essentiellement à bord d’un magnifique voilier sous les couleurs de la Méditerranée, alors que Le talentueux Mr Ripley nous offre une confrontation Matt Damon /Tom et Jude Law/Richard (ou Dickie) dans diverses villes italiennes dont Rome et ses rues sous le grand soleil de l’Italie et sa luminosité. Le spectateur, pris dans la moiteur de cette chaleur estivale, en est accablé.
En cela, très différente est la série Mr Ripley où l’affrontement entre Andrew Scott /Tom et Johnny Flynn / Dickie, se fait sans aucune couleur mais dont le tournage en noir et blanc met l’accent sur le moindre détail de l’environnement que ce soit à Rome avec sa magnifique statuaire, Venise et ses palais tout en clapotis. Finie la luminosité écrasante du sud, mais oh combien fines sont traduites chaleur, moiteur et fatigue, par les plans successifs, les envolées de marche d’escaliers qui se découvrent à chaque coin de rue et que doivent emprunter nos différents personnages.
Ici, on suit réellement les acteurs pas à pas, marche à marche, leurs pensées et leurs actes et celles de Tom qui sont disséquées, très finement ciselées, rendant le personnage vertigineux et l’ensemble donne à la série un niveau de Force que personnellement je n’ai pas retrouvé dans les films.
A une certaine légèreté à la « Dolce Vita » italienne vient s’opposer ici la gravité du propos.
A remarquer que dans tous ces scenarii, cette jeunesse riche, « dorée » transpire l’ennui qu’elle essaye de masquer tantôt par une agitation mondaine, tantôt par un pseudo engagement artistique, donnant encore plus de volume au personnage complexe de Tom.
Cette série m’a donné une très forte envie : à la fois, revoir Plein soleil, découvrir Le talentueux Mr Ripley, d’ailleurs disponible sur Netflix, mais aussi lire le livre à l’origine et « cerise sur le gâteau », acheter un livre d’art sur Caravage !
A chaque fois ce furent des plaisirs différents mais complémentaires.
L'auteur
Steven Zaillian est connu, entre autres nombreuses réalisations, comme scénariste de La liste de Schindler et Les gangs de New York.
Commentaires
J'ai adoré votre commentaire, regardant une 2e fois en 3 semaines cette série magnifiquement filmée. Attirée par le noir et blanc, je suis totalement rentrée dans le film. J'ai adoré le parti pris de la lenteur, cette impression d'être en temps réel qui permet aussi au téléspectateur d'observer le décor, les objets , les visages (félicitations aux réceptionnistes, au chat, aux inspecteurs) dans les scènes au lieu de n'avoir d'yeux et d'oreilles que pour l'intrigue. Ce temps lent permet de vraiment savourer tout l'humour parfois un peu caché, "le comique" des répétitions, les centaines de marches graviers par les différents compères de l'histoire, le rôle magnifique du chat... Bref, je suis ravie de le revoir. Et de la même façon que vous le suggérez, cela m'a donné un l'immense envie de revoir les autres adaptations. Merci pour votre article, l'analyse est fine et plutôt positive, je me sens moins seule dans mes goûts. Brigitte
Je souscrits tout autant à la chronique qu'au commentaire très juste de Brigitte Delahodde. Rippley est une série absolument hors norme par sa qualité esthétique et sa mise en scène tout en subtilité. Elle donne à Andrew Scott un rôle époustouflant de retenue et de cynisme. La temporalité de la série donne une vie à l'intrigue bien plus intense que dans le film "Le talentueux Monsieur Rippley", et sa palette de stars, qui avec leurs qualités propres, pourraient presque donner l'impression d'une autre histoire !
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