Bande de génies, Mémoires du Montparnasse des Années Folles

Souvenirs de Robert McAlmon (1895-1956), un de la Bande de génies et l’un des principaux acteurs de la vie littéraire des années 1920.
De
Robert McAlmon
Séguier
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Paul Simon Bouffartigue
Parution le 18 janvier 2024
475 pages
22.90 €
Notre recommandation
4/5

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Thème

Mémoires du Montparnasse des Années Folles tel est le sous-titre de cette autobiographie qui met en scène la bande des « expatriés », anglo-saxons des années 20 sous la plume de celui qui fut l’un des leurs ; dadaïstes, surréalistes, post impressionnistes, imagistes, féministes, critiques, éditeurs, certains  ont laissé leur nom dans l’histoire des arts mais beaucoup sont des décadents alcooliques, des diletantes fort imbus d’eux-mêmes appartenant à une génération perdue qui ne dit plus grand-chose au lecteur actuel.

Points forts

  • L’originalité de cette « Bande de génies », dont la réputation n’a guère franchi le siècle, qui se  veulent « littéraires à tout prix » et se retrouvent dans les bistrots du « quartier » (Montparnasse), demeurant « collés les uns aux autres » en compagnie de quelques Français comme Cocteau, Robert Desnos, Marcel Duchamp ou Tristan Tzara. 

  • La découverte d’une bohème artistique anglo- américaine (et irlandaise autour de Joyce) déracinée, composée de grands alcoolos de génie plus ou moins ratés et vivant complètement entre eux dans les cabarets parisiens où ils passent leurs nuits à boire. 

  • Une succession de portraits très enlevés comme celui de Gillespie autodéclaré spécialiste du langage qui invente des mots à rallonge, Doucet qui lit un roman tout en jouant du piano au Bœuf sur le Toit ou Joyce et son génie des mots qui n’arrive pas à finir son Ulysse…

  • A côté d’eux, des Américains richissimes, mondains professionnels, qui entretiennent ces  « artistes » arrivistes au talent discutable et à la notoriété incertaine, modernistes, écologistes avant l’heure, la plupart de tendance anti fasciste, séduits par le communisme (en fait, les précurseurs de nos intellectuels de gauche, mais  séduits par l’alcool plus que par la drogue)

  • Le nombre impressionnant de suicidés parmi ces artistes plus ou moins reconnus qui prennent tout à coup conscience de leur insignifiance.

  • Si la transcription est parfois lourde, une mention spéciale doit cependant être attribuée au traducteur Paul Simon Bouffartigue pour ses nombreuses notes en bas de page, indispensables pour situer chaque personnage évoqué (et Dieu sait s’ils sont nombreux !)

Quelques réserves

  • L’auteur se prend assez au sérieux et se montre extrêmement sévère avec la plupart des (pseudos ?) écrivains ou artistes décrits tout en ne négligeant pas de mettre en avant sa propre production.

  • La traduction lourde au style ampoulé, rend certaines phrases pratiquement incompréhensibles. 

  • Aucune chronologie, les anecdotes se succèdent au gré des souvenirs de l’auteur.

Encore un mot...

Le titre « Bande de génies » semble particulièrement bien trouvé puisqu’il résume à lui seul le sarcasme de cet ouvrage et de ce milieu très particulier des expatriés américains de Montparnasse, artistes besogneux plus ou moins reconnus : ne pas oublier qu’il fallut un procès pour déterminer si une œuvre de Brancusi relevait de l’objet manufacturé à l’utilité ignorée ou d'une œuvre d'art d’une beauté égale à celles exposées dans les musées les plus connus du monde.

Une phrase

« Anne Porter avait séjourné à Paris, ville qui débordait d’activité à cette époque. Oui, pendant plusieurs années on a pu y voir presque tous les écrivains, anglais, américains, français ou scandinaves, qu’ils soient déjà célèbres ou en passe de le devenir ; on pouvait, si on le souhaitait y rencontrer Proust, Joyce, Ezra Pound, Dos Passos, Cummings, Thomas Mann, Jules Romain et bien d’autres encore » P. 387

L'auteur

Ce n’est pas le moins intéressant de la bande : Robert McAlmon, né en 1895 et mort en 1956, épouse par inadvertance en 1921 une richissime héritière, une poétesse nommée Bryher, qui s'avère être la fille de Sir John Ellerman, l'homme le plus riche d'Angleterre ;  sans souci d’argent désormais. Il devient l’un des principaux acteurs de la vie littéraire des années 1920 et le « parrain » des expatriés américains des nuits de Montparnasse ; lors de la dernière année de rédaction d'Ulysse, il aide James Joyce en lui donnant de l'argent, et même en tapant le monologue de Molly Bloom quand toutes les dactylographes de Joyce y avait renoncé.

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