Mon Bébé
Avec "Mon Bébé", Liza Azuelos confirme qu'elle est la championne des comédies mère-fille. D'autant qu'en l'occurrence, elle est servie, dans le rôle de la mère, par une Sandrine Kiberlain, au top de sa forme.
Infos & réservation
Thème
Femme libérée et épanouie, mais mère très dépendante de ses trois filles, Héloïse se met à flipper. Elle vient d’apprendre que sa petite dernière, Jade, dix-huit ans, va quitter le nid familial pour continuer ses études au Canada.
Au fur et à mesure que la date du baccalauréat de son « bébé » et par là même, celle de son départ se rapprochent, elle va non seulement plonger dans la nostalgie, mais se mettre à filmer sa fille adorée avec son iphone, frénétiquement, de son lever à son coucher, de peur qu’ensuite, certains souvenirs ne lui échappent.
Elle va tellement paniquer et se mettre à courir trop vite après le temps, qu’elle va en oublier de vivre et se fourrer dans des situations assez rocambolesques.
Amour maternel, quand tu nous tiens....
Points forts
-Liza Azuelos revient à ses premières amours: la comédie mère-fille. Encore ? Ben oui ! Et tant mieux ! Parce que, non seulement dans le cinéma hexagonal, Liza en est la championne, mais aussi parce qu’à chaque nouvel opus, elle s’améliore. Ses filles grandissent, prennent leur autonomie, sont de mieux en mieux dans leurs baskets? Elle aussi, dans l’exact même temps: ses scénarios sont plus serrés, plus loufoques et plus dingues, ses dialogues, plus énergiques, et ses distributions, plus percutantes. Et cela, en restant quand même proche d’un certain réalisme.
-Côté rythme, ça déménage. Liza Azuelos est un maelström. Elle tourne comme elle doit vivre dans sa vraie vie : à toute allure ! Résultat : ses films , qui véhiculent, pêle-mêle, amour, bonheur, joie de vivre, tendresse, gentillesse et…sincère mauvaise foi, dégagent une énergie folle. C’est pour cette raison que lorsqu’on les regarde, même si par moments, ils véhiculent nostalgie et chagrin, ils font un bien fou.
-Celui-là, particulièrement. En grande partie grâce à sa distribution cinq étoiles. A commencer par Sandrine Kiberlain, qui incarne la mère (c’est-à-dire, en fait, Liza elle-même, puisque son film est autobiographique). Une Rolls-Royce, cette Sandrine ! Avec son sens inné du tempo, sa façon de jouer d’une précision de dentellière, sa capacité à faire rire et à émouvoir dans la même réplique, et aussi son aisance, son naturel et son charisme indubitables, elle mérite 10 sur 10 !
- Pour incarner le Bébé de cette actrice prodige, il fallait une comédienne à la hauteur de sa drôlerie, de son savoir-faire et de sa fantaisie. Liza Azuelos n’est pas allée chercher cette perle bien loin. Elle a choisi celle qui est son Bébé dans la vraie vie, sa propre fille, Thaïs Alessandrin. Une ado presque adulte, dotée, elle aussi, d’un sacré tempérament et d’un talent certain. Ça tombait d’autant mieux que dans la vie, Thaïs et Sandrine s’adorent et que, bien sûr, cette connivence se ressent à l’écran.
Quelques réserves
Les esprits chagrins se plaindront peut-être que les rapports mère–fille aient déjà été traités maintes fois au cinéma et que côté nouveauté, on repassera. On leur rétorquera qu’avec Liza Azuelos, il n’y a aucune chance de basculer dans du déjà vu. Pour une raison très simple : cette réalisatrice s’inspire de son vécu. C’est d’ailleurs ce qui donne à ses films leur singularité joyeuse et leur modernité .
Une phrase
«Dès le début, j’ai rêvé que Sandrine Kiberlain accepte le rôle car des actrices françaises aussi douées qu’elle…il y en a peu !...Je savais qu’elle serait fantastique dans le rôle de …moi (rires !).Je l’avais déjà croisée dans le privé et j’ai senti qu’on se ressemblait pas mal, que mes mots résonneraient juste dans sa bouche…En plus Sandrine est une vraie gentille, ce qui était important car elle devait donner la réplique à une comédienne débutante. Elle a d’ailleurs été géniale avec Thaïs » (Liza Azuelos, réalisatrice).
L'auteur
Née le 6 novembre 1965 à Neuilly-sur-Seine, Liza Azuelos est la fille de l’actrice Marie Laforêt et de Judas Azuelos, un homme d’affaires marocain.
Elle n’a que deux ans quand ses parents se séparent. Sa mère en a la garde. mais elle l’envoie dans un pensionnat en Suisse, d’où son père la sortira, à l’âge de douze ans. Après son bac, la jeune Liza entame des études de gestion. En 1987, devant le krach boursier, elle tourne le dos au monde des affaires et commence à travailler dans le cinéma. Elle devient assistante, écrit, et rencontre celui qui deviendra son mari, le réalisateur Patrick Alessandrin, dont elle divorcera après onze ans de mariage. En 1995, elle signe avec lui, son premier scénario Ainsi soient-elles. En 2001, elle écrit, toute seule, 15 Août . C’est un succès, elle est lancée. En 2006, elle écrit et réalise Comme t’y es belle, puis, en 2008, LOL, avec Sophie Marceau (plus de trois millions d’entrées), et, en 2014, Une Rencontre , encore une fois avec Sophie Marceau.
En 2O17, elle fait une incursion dans le biopic avec un formidable Dalida, écrit sous le regard attentif du frère de la chanteuse.
Avec Mon bébé, la voici de retour dans le registre qu’elle préfère, la comédie, et sur un thème qu‘elle affectionne, celui des rapports mère-fille.
Et aussi
-« Rebelles » d’Allan Mauduit- Avec Cécile de France, Audrey Lamy, Yolande Moreau…
Pour fuir un mari qui la brutalisait sur la côte d’Azur, Sandra, ex Miss Nord-Pas de Calais (Cécile de France, bluffante comme d’habitude) revient s’installer chez sa mère à Boulogne-sur-Mer. Embauchée à la conserverie de poissons, elle repousse un jour les avances de son chef, tellement vigoureusement, qu’elle le tue. Deux de ses copines (Audrey Lamy et Yolande Moreau) sont témoins de la scène. Alors qu’elles s’apprêtent à appeler la police, elles découvrent, à côté du mort, un sac rempli de billets de banque. Ni une ni deux, elles le barbotent. Sans se douter qu’elles viennent de se fourrer dans un sacré guêpier…
Waouh ! A la fois burlesque populaire, rigolarde et franchement féministe, voilà une comédie-polar qui dépote ! S’il fallait des références, on pourrait dire qu’elle emprunte à Tarantino, pour sa noirceur rigolote, aux Branquignols, pour son burlesque, à Hara Kiri pour ses blagues « too much », et aux …Trois Mousquetaires puisqu’ici, elles sont trois héroïnes aussi retorses qu’unies contre l’adversité; en l’occurrence, une bande de malfrats à pas piqués des hannetons. Evidemment à la fin, les trois hussardes emportent le morceau. Ces messieurs dégustent. Nous, on s’est bien gondolés.
Recommandation : excellent
-« Convoi exceptionnel » de Bertrand Blier- Avec Christian Clavier, Gérard Depardieu, Alex Lutz…
Un jour, un zigue déboussolé poussant un caddy dans une rue embouteillée(Gérard Depardieu) se cogne littéralement dans un autre olibrius , sinistre, fulminant et qui a l’air pressé (Christian Clavier)…Le premier, SDF, prétend transporter ses souvenirs et sa vie dans son caddy, qui est pourtant vide . Le second, un mec en apparence grand bourgeois, affirme obéir à l’ordre d’un scénario en cours d’écriture, dont il serait un des personnages… Un pauvre hère sans mémoire à la recherche d’un sens à son existence faisant tandem avec un excité, dérangé, qui soutient être le héros d’une fiction…Nous voilà embarqués dans l’aventure la plus déjantée de ce début d’année. On se dit que cela ne tiendra pas jusqu’au bout, que cette situation va s’essouffler, tourner en rond et ennuyer. C’est mal connaître Bertrand Blier !
Après neuf années de silence, le cinéaste de Buffet froid et de Trop belle pour toi nous revient en pleine forme. Avec ce Convoi exceptionnel, il prend un malin plaisir- comme il sait si bien le faire- à mettre les pieds dans les plats de la bienséance et de la provoc. Répliques qui tuent, situations loufoques, personnages abracadabrantesques, tous ces éléments sortis d’un esprit où semblent se côtoyer un surréalisme à la Magritte et une poésie urbaine, rude et bouleversante, à la François Villon…Où mettre ce film incroyable, qui joue aux montagnes russes avec le meilleur et le…moins bon ? Inutile de chercher. Cette comédie noire, désenchantée et improbable, est inclassable. Oui, et alors ? D’autant que Gérard Depardieu et Christian Clavier (au sommet) semblent s’amuser comme des fous .
Recommandation : excellent
-« Rosie Davis » de Paddy Breathnach- avec Sarah Greene, Moe Dunford…
Rose Davis, son mari et leurs quatre enfants mènent une vie modeste, mais heureuse. Un jour, le propriétaire de leur maison décide de vendre. Incapables de faire face financièrement à une nouvelle location, ils se retrouvent à la rue, basculent dans la précarité. Trouver une chambre à Dublin, même pour une nuit, devient un défi quotidien. Soutenue par son époux, plongeur dans un restaurant, Rose Davis va affronter cette épreuve avec courage, en tentant de préserver ses enfants et son bonheur familial…
Vous aviez été touchés par Moi, Daniel Blake de Ken Loach (2016), émus par Rosetta des frères Dardenne (1999) ? Pour tourner Rosa Davis, son réalisateur a emprunté, au premier, son naturalisme sans pathos, aux seconds, leur urgence. Le résultat est qu’on est émus aux larmes par son film, d’une sobriété rare pour un tel sujet. Il faut dire aussi qu’il est porté par une comédienne aussi lumineuse qu’elle est incroyable de vérité: Sarah Greene.
Recommandation : excellent.
-« Aïlo : une odyssée en Laponie- De Guillaume Maidachevsky- Conte fictionnel.
Tourné dans les paysages grandioses de la Laponie, Aïlo raconte la délicate première année de vie d’un bébé renne venu au monde avec un peu d’avance, de ses premiers pas de nouveau-né chancelant, à sa première transhumance où, par des températures avoisinant souvent les moins 40°, il va se trouver confronté à ses pires ennemis, dont, notamment le loup et le glouton.
Parce qu’il tient en trois lignes écrites en noir et blanc, le pitch de ce conte animalier fictionnel, qui relève un peu aussi du documentaire, ne donne aucune idée de sa beauté éblouissante et de sa richesse informative. Car en une heure et 26 minutes, on en apprend (et on en voit) de belles sur la vie des animaux dans le pays du Père Noël ! On regarde ce film – dont aucun plan n’est truqué- les yeux écarquillés, les oreilles grandes ouvertes. Son réalisateur est biologiste de formation et on comprend tout de suite qu’il connaît la nature comme sa poche, qu’il l’aime et la respecte, comme il aime et respecte aussi les animaux sauvages qui peuplent cette région si immaculée et qui voit naitre les rennes . On est d’autant plus admiratif de son travail que pas une seconde la tension ne tombe. Il faut dire que le commentaire, bourré d’apartés rigolos et dit très joliment par le chanteur Aldebert, est à la fois romanesque et pédagogique (un peu, mais pas trop) et que la musique est splendide. Comme voyage initiatique à l’écologie, on a rarement fait mieux. A voir par les grands et par les petits.
Recommandation : excellent.
-« Ma vie avec John F. Donovan » de Xavier Dolan, Avec Kit Harington, Jacob Tremblay, Nathalie Portman…
Ruppert, onze ans, qui vit seul avec sa mère, une femme aimante mais assez dévorante, nourrit une passion folle pour John F. Donavan, un acteur vedette de la télévision. Un jour, il se décide à lui écrire. Contre toute attente, John répond à l’enfant. Va s’en suivre entre eux une vraie correspondance, qui durera jusqu’au suicide de la star. Devenu acteur lui même, Ruppert finira par dévoiler cette correspondance. L’occasion pour lui d’aborder les sujets qui le hantent : les relations mère-fils, les discriminations liées à l’homosexualité, l’intolérance, etc…
On ne change pas un cinéaste qui, depuis ses débuts, à vingt ans, nourrit ses films de ses obsessions. Pour sa huitième réalisation, Xavier Dolan enfonce donc le clou de ses fantasmes, de ses cauchemars et de ses rêves, avec cette même sincérité qui fait de lui un créateur si singulier. Mais il le fait là, avec encore plus d’audace formelle et d’ambition scénaristique. On prendrait un vrai plaisir cinéphilique à regarder Ma vie avec John F. Donovan, si par noments, ce film n’était pas si nombriliste qu’il en devient exaspérant. Ce défaut d’enfant gâté vient de valoir à Xavier Dolan les foudres de la critique américaine. Nous, en France, on aime ce canadien parce qu’il a un talent fou et de l’imagination à revendre, et qu‘il est un vrai cinéaste.
Recommandation : bon.
-« Les Témoins de Lendsorf » d’Amichai Greenberg- Avec Ori Pfeffer, Rivka Gur, Hagit Dasberg…
Chargé de la conservation des lieux de mémoire liés à la Shoah, Yoel, historien juif orthodoxe, enquête sur un massacre de juifs durant la seconde guerre mondiale, massacre qui aurait eu lieu aux abords de Lendsdorf, un village autrichien. Jusqu’ici patientes et minutieuses, les recherches de Yoel s’accélèrent lorsque la municipalité le contraint à trouver des preuves tangibles des faits dans les quinze jours à venir. Une course contre la montre s’engage, qui va faire basculer le film à la fois vers le thriller et le portrait, celui d’un homme qui s’interroge sur son identité…
Pour faire ce film inspiré d’un épisode vrai, mais méconnu de la Shoah, Amichai Greenberg dit qu’il a pensé à Conversation secrète de Francis Ford Coppola et à Paris Texas de Wim Wenders. Il est indéniable qu’il y a une parenté entre ces deux œuvres et Les Témoins de Lensdorf. Ne serait-ce que par leur sujet (une enquête solitaire suivie par un personnage central), et leur rythme, qui pourrait être celui de l’introspection...
Quelles qu’en soient ses références, Les Témoins de Lendsdorf est un film qui a une belle singularité. Il est assez hypnotique, parce que labyrinthique et obsessionnel. Il a un dénouement inattendu. Et un acteur charismatique, Ori Pfeffer.
Recommandation : bon
Ajouter un commentaire